Le 7 janvier 2015, les frères Kouachi décimaient la rédaction de Charlie Hebdo. Ils étaient imités, deux jours plus tard, par Amedy Coulibaly, qui s'en est pris à l'Hyper Cacher. Michel Wieviorka, sociologue à l'EHESS, estime que ces attentats ont profondément marqué la société française.
Qu'ont changé les attentats de janvier pour les Français ?
Ces attaques ont montré que le pays n'était plus à l'écart de la violence extrême. Des millions de Français se sont mobilisés, le 11 janvier, derrière François Hollande. Ces événements ont commencé à donner du poids à l'autoritarisme et au désir de faire appel à des lois d'exception, comme l'état d'urgence. Cela a placé le pays sur la même ligne que les Etats-Unis après le 11 septembre 2001. Les attentats ont aussi renforcé l'amalgame entre l'islam et l'islamisme.
Aujourd'hui, qu'est devenu l'esprit Charlie au sein de la population ?
La société française a bien réagi après ces attaques, parce qu'elle a pu faire confiance à ses institutions. L'esprit «Charlie» signifiait l'émotion, le désir de solidarité, d'être protégé par l'Etat, mais aussi le refus de céder à la violence. Aujourd'hui, je ne dirais pas qu'au point de vue des valeurs auxquelles ils se référent, les Français soient plus «Charlie» qu'ils ne l'étaient il y a un an. Cet esprit du 11 janvier correspond à une illusion groupale qui a duré jusqu'au moment où la vie quotidienne a repris ses droits.
Quelle résonnance aura cette année 2015 dans l'Histoire ?
Elle restera non pas comme celle de l'accélération de phénomènes terroristes, puisque cela n'est pas nouveau, mais comme la précipitation d'une crise qui n'est pas seulement économique et sociale. L'année 2015 a révélé une crise morale, du système politique et de nos institutions. Les attentats du 13 novembre ont d'ailleurs renforcé ce phénomène.