Un mois après son arrivée au ministère de l’Éducation, Najat Vallaud-Belkacem dresse un bilan positif vis-à-vis des rythmes scolaires.
On lui promettait des difficultés au moment de reprendre les rênes du ministère de l’Éducation nationale. Mais un peu plus d’un mois après son arrivée rue de Grenelle, juste avant le coup d’envoi de la rentrée scolaire, Najat Vallaud-Belkacem n’a finalement pas été confrontée aux blocages attendus.
La généralisation de la réforme des rythmes scolaires est désormais sur les rails, mais son application mérite encore quelques ajustements pour définitivement s’installer dans les classes.
Comment jugez-vous vos premières semaines au ministère de l’Éducation nationale ?
C'est forcément sportif de prendre ces responsabilités à quelques jours d'une rentrée scolaire. Mais je vous rassure, une rentrée se prépare quasiment un an à l'avance... Celle-ci s'est d'ailleurs particulièrement bien passée et c'est la conséquence des choix que nous avons fait depuis le début du quinquennat : plus de postes d'enseignants, d'auxiliaires de vie scolaires, d'ouvertures de classes, de moyens pour l'éducation prioritaire... Même la généralisation des nouveaux rythmes scolaires, qu'on prédisait compliquée, se passe somme toute bien.
La réforme a fait couler beaucoup d’encre. Tout est rentré dans l’ordre désormais ?
Nous avons passé une étape importante, à savoir son déploiement dans toutes les communes. Aujourd'hui l'ensemble des écoles de France ouvre bien cinq matinées par semaine, ce qui va permettre aux élèves d’améliorer leurs apprentissages, car on sait qu'on apprend mieux le matin. Pour autant, il y a encore du travail à faire pour que partout sur le territoire, les élèves aient accès à des activités périscolaires (artistiques, culturelles, sportives...) qui sont encore très inégalement installées aujourd'hui. Harmoniser cette offre, en élever la qualité, c'est désormais le chantier que nous conduisons avec les collectivités locales.
Mais comment inciter les communes à offrir un temps périscolaire enrichissant ?
Il est de l’intérêt des communes elles-mêmes de développer un périscolaire de qualité, à travers notamment les projets éducatifs territoriaux ou tous les acteurs au niveau local s'associent pour offrir le meilleur aux enfants.
Quels retours avez-vous des communes ?
Dans celles qui ont adopté la réforme dès l’an dernier, il y a plus de recul et les effets positifs de la réforme sont bien identifiés, notamment la qualité et le temps gagné dans l'apprentissage de la lecture. Dans les autres, il y a ici ou là encore des organisations à trouver. Indéniablement, le changement de rythmes scolaires exige de tous une adaptation qui n'a rien de simple. Par ailleurs, les collectivités ont eu un important travail d'anticipation, d'organisation et de gestion des temps périscolaires. Je conviens que ce soit exigeant, mais c'est ambitieux.
Et du côté des familles ?
Même chose pour les parents : nouveaux horaires, nouveaux interlocuteurs que sont les animateurs en fin de journée, nouvelle organisation avec des activités périscolaires qui ne sont pas encore forcément stabilisées. Oui, cela peut paraître contraignant, mais chaque difficulté s'arrange au bout de quelques semaines et le personnel éducatif en particulier joue un rôle précieux pour aplanir les difficultés.
Qu’en est-il d’une éventuelle réforme des rythmes dans le secondaire ?
L'ambition, c'est de donner véritablement aux collèges les moyens de faire réussir tous les élèves qu'ils reçoivent. Avec de nouveaux programmes, une nouvelle évaluation, des moyens de prévenir et de lutter effectivement contre le décrochage scolaire... C'est dans ce cadre général que la question des temps scolaires se posera.
Le budget 2015 préserve l’Éducation. Un signal fort sur les priorités de l’état ?
Il ne s'agit pas que d'une préservation, mais d'un investissement fort, ambitieux et assumé. C'est la priorité de notre gouvernement que de permettre à la jeunesse française d'être l'une des mieux formées du monde. Enfin l’Éducation redevient le premier budget de la Nation (88,07 milliards d’euros, pour le ministère de l’Éducation national, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, ndlr), devant les intérêts de la dette. C'est la meilleure façon de préparer l'avenir.
Vous avez instauré le Café des parents, une rencontre mensuelle avec des parents d’élèves. Une expérience réussie ?
Je veillerai comme ministre à renforcer dans les établissements scolaires le dialogue entre l'école et les parents. C'est pour moi une condition de la réussite des enfants. Au moment où nous demandons aux établissements scolaires de s’ouvrir davantage, le ministère, lui, ne peut pas continuer à renvoyer une image de citadelle. Oui, les parents ont tout leur rôle à jouer et leur place à prendre lorsque l'on parle d'éducation. Je veux créer les conditions d'une alliance entre eux et les enseignants pour permettre à ces derniers de travailler, dans le meilleur climat de confiance possible, à la réussite des élèves.
La conférence sur l’évaluation des élèves a été lancée, avec la volonté de recueillir des propositions de la société civile. Où en est-on ?
Ce que nous faisons est profondément cohérent et structurant. La réforme des évaluations va de pair avec celle des programmes : au moment où l’on s’apprête à redéfinir ce qu’un élève doit avoir acquis au terme de sa scolarité obligatoire (le socle) et les programmes qui en découlent, c’est bien de redéfinir la manière dont on l’évalue, pour faire progresser l’élève d’année en année. Notre démarche pour faire cette réforme est inédite: au sein d'un jury constitué pour l'occasion, 30 personnes (professionnels de l'éducation, parents, lycéens...) travailleront ensemble, auditionneront des experts, verront le résultat des expérimentations conduites en France et à l'étranger… et me rendront leurs recommandations en décembre.
Dans le but de rendre la notation plus positive ?
Sur les modalités, la réflexion est ouverte. Sur la finalité, l’idée est de permettre à chaque élève de progresser sur son chemin personnel. Nous sommes dans un système où l’évaluation s'apparente trop souvent à du tri, du classement par rapport aux autres. On ne prend pas assez en compte les progrès de l’enfant. Nous souhaitons une notation stimulante et encourageante plutôt qu’excluante. L’école doit faire progresser et réussir chacun.
Une consultation est aussi en cours concernant le socle commun de connaissances, de compétences et de culture, et le programme de l'école maternelle. Est-ce votre chantier le plus important ?
Je ne sais pas si le grand public a conscience de son importance, sans doute pas encore, mais oui, c’est le chantier le plus structurant. Réformer le socle et les programmes, c'est tout à la fois fixer un niveau d'exigence scolaire pour notre jeunesse, favoriser la réussite scolaire, mais aussi améliorer les conditions de travail des enseignants tant il est vrai qu'on programme inadapté, trop lourd ou redondant d'une année sur l'autre peut être contraignant et inefficace...
Le programmes Erasmus vient d’être rénové en Erasmus + : Qu’en attendez- vous ?
Les étudiants, les apprentis, les adultes en formation continue… tous doivent se saisir de cette chance inouïe de passer plusieurs semaines ou mois dans un autre pays européen, aidés par des bourses, de faire cette expérience inoubliable qui donne corps à l'Europe, et qui est d'ailleurs sans doute l'une de ses plus belles réalisations. Il y a désormais beaucoup plus de possibilités d'en bénéficier grâce à un budget en hausse de 40% alors... Allez-y !