La direction d'Air France a mis une nouvelle proposition sur la table mercredi soir pour tenter de mettre fin à la grève des pilotes, qui ne semble pas en voie de s'essouffler avec quatre avions sur dix prévus jeudi.
Au troisième jour de grève, "la profession est derrière nous, la mobilisation est forte, ça montre que notre combat est juste", a déclaré Jean-Louis Barber, président du SNPL AF Alpa (syndicat majoritaire), à l'issue de la première assemblée générale organisée depuis le début du conflit par les trois syndicats en grève (SNPL, Spaf, Alter).
Plus de 250 pilotes ont pris part à la réunion. A leur sortie, la plupart refusaient de parler à la presse. Le message de l'AG était "tenir bon sur le contrat unique", a résumé François Hamant, d'Alter (non représentatif).
Ce contrat pilote unique pour toutes les compagnies du groupe Air France (Air France, Transavia, Hop!) est la condition posée par les syndicats pour soutenir les projets de développement de la filiale low cost du groupe Transavia, à l'origine du conflit.
Trop cher, répond la direction. Pour réagir à la concurrence toujours plus vive de transporteurs à bas coûts, le groupe AF-KLM souhaite développer la flotte de Transavia en France en attirant des volontaires d'Air France. Il veut aussi ouvrir de nouvelles bases Transavia en Europe dès 2015, avec des pilotes sous contrats locaux.
Après avoir proposé mardi de limiter temporairement l'extension de Transavia à 30 avions en France jusqu'en 2019, Air France a mis sur la table mercredi soir une deuxième offre: conclure avec les syndicats un accord délimitant précisément les activités de Transavia en France, en Hollande et ailleurs en Europe.
Interrogé par l'AFP, le porte-parole du Spaf Julien Duboz a jugé que ce n'était "pas acceptable", cette offre revenant selon lui à "repousser le tas de sable", a-t-il dit en renvoyant aux risques de "délocalisations".
Le SNPL n'avait pas réagi dans l'immédiat. Selon la compagnie, les négociations doivent reprendre jeudi à 10H00.
60% de pilotes en grève
Défendant leurs conditions de travail, plutôt avantageuses, les syndicats disent craindre à terme des transferts de lignes vers la low cost. Selon une source interne d'Air France, le coût horaire des pilotes est 40% plus élevé chez Air France que chez Transavia. Les pilotes d'Air France sont en moyenne payés entre 75.000 et 250.000 euros brut annuels.
Depuis lundi, la grève est massivement suivie, par 60% des pilotes selon la direction (75% selon le SNPL). Autant de grévistes se sont déclarés pour jeudi, selon la compagnie, malgré l'appel du Premier ministre Manuel Valls à "arrêter" cette grève" qui "n'est pas comprise".Auparavant, le ministre de l'Économie Emmanuel Macron avait appelé l'entreprise "à quelques concessions".
C'est un "projet de développement", "je ne comprends pas pourquoi tout le monde ne veut pas s'y associer", a dit le PDG d'AF-KLM Alexandre de Juniac, lors d'une visite à Roissy pour remercier les pilotes qui volent.
Selon Air France, 40% des vols ont été assurés mercredi, comme la veille, avec dans certains aéroports jusqu'à 90% d'annulations. La direction annonce pour jeudi "42% de vols maintenus". Le SNPL estime que la direction minore le taux d'annulations en comptabilisant notamment des vols Hop! exploités pour le compte d'Air France.
Air France recommande toujours à ses clients ayant un vol d'ici au 22 de reporter leur voyage ou changer leur billet sans frais. Un mouvement d'une semaine serait le plus long conflit mené par des pilotes d'Air France (groupe Air France-KLM) depuis 1998. La direction évalue son coût de 10 à 15 millions d'euros par jour, hors dédommagements.
Si le conflit continue, "il pourrait mettre en péril les emplois de l'entreprise", s'est alarmé le syndicat FO des agents de maintenance. Il déplore - comme la CFE-CGC et la CFDT - que cette grève sape les efforts réalisés par les salariés depuis 2012.
Le préavis reconductible du SNPL court jusqu'au 22 septembre, ceux du Spaf (deuxième syndicat) et Alter (non représentatif) jusqu'au 20. Le SNPL AF Alpa décidera vendredi s'il reconduit au-delà lundi le mouvement. Le syndicat, qui défendra sa première place en mars prochain lors des élections professionnelles, "ne peut plus faire marche arrière", observait un représentant syndical.