En manque d'imams, les mosquées françaises ont fait appel à près de 400 religieux venus des pays de tradition musulmane pour assurer les prêches du ramadan.
L'heure de la fin du jeûne approche à Argenteuil (Val d’Oise), et Mohammed Bouzid attend les fidèles dans les locaux temporaires de l’association Essalam, à quelques pas de la future mosquée. Rares sont pourtant les fidèles qui le connaissent bien.
Il fait partie des centaines d’imams venus en renfort comme chaque année dans les mosquées françaises pour le ramadan, qui s'achève au début de la semaine prochaine.
A Rabat, l’imam au français impeccable est directeur d’un collège-lycée, professeur et chercheur en pensée islamique. Chaque année, il vient épauler un imam local pendant le mois de ramadan, ou officier dans des communautés dépourvues d’imam.
L'imam a pour mission de mener les six prières quotidiennes de ramadan et d’assurer les longues veillées qui se terminent vers cinq heures chaque matin. Un rythme éreintant à ajouter au jeûne, assez pénible en plein été. Entre les prières, l’imam répond aux questions des centaines de fidèles qui fréquentent la mosquée, et les accompagne dans leur vie en France et au Maroc.
En ce mois de ramadan de l’année 2014 (1435 selon le calendrier islamique), 225 imams sont venus du Maroc et 120 d’Algérie, rémunérés par leur Etat. Une trentaine d’imams turcs viennent également renforcer les 200 imams salariés par la Turquie déjà présents en France à l’année.
Cette année, cinq Marocaines sont aussi venues animer les veillées de ramadan.
- 'Des voix nouvelles' -
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Les imams sont envoyés à tour de rôle dans les différents pays où leurs compatriotes sont présents. M. Bouzid est passé par l'Italie, la Belgique, l'Espagne et les Pays-Bas.
Face à la pénurie d'imams, le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve a exhorté le 7 juillet le Conseil français du culte musulman (CFCM), miné par des querelles entre fédérations, à prendre des mesures pour permettre la formation d'un plus grand nombre de religieux. Seule une poignée d'imams sort chaque année des quelques instituts de formation français.
“Les imams +permanents+ trouvent un appui considérable" auprès de leurs confrères étrangers. "Ce sont de nouveaux visages mais aussi des voix nouvelles qui prêchent avec talent”, assure Mohammed Moussaoui, président de l’Union des mosquées de France (UMF).
Selon M. Moussaoui, les imams choisis par le ministère marocain des Affaires islamiques et la fondation Hassan II pour venir officier en France, à la demande de l'UMF, sont plutôt jeunes et très diplômés. Tous ne parlent pas français, la prière se faisant en arabe, mais chaque mosquée les accueille en les sensibilisant à la laïcité et aux lois françaises, au "respect mutuel" et au "vivre-ensemble".
Plus expérimenté, Mohammed Bouzid est aussi là pour enseigner les bonnes pratiques dans les mosquées où il prêche. L’imam local "parle avec les fidèles et pratique la prière avec moi, puis je m’assois avec lui et nous en discutons”, assure le religieux. Il dit insister dans ses interventions sur la nécessité de s'intégrer à la société dans laquelle vit le croyant, et défendre aux jeunes de partir en Syrie faire "un faux jihad".