Actions de groupe, tabac, tiers payant: la ministre des Affaires sociales Marisol Touraine présente jeudi les orientations de la future loi santé, placée sous le signe de la prévention et de la réduction des inégalités d'accès aux soins.
Outre le contenu même de cette loi, qui dans le détail ne sera connu qu'à la rentrée, son financement reste l'inconnue.
Le gouvernement veut réduire encore la progression des dépenses de santé et prévoit 10 milliards d'économies pour 2015-2017 pour la branche maladie, ce qui réduit les marges de manœuvre pour la loi de santé publique.
Cette loi doit reprendre les grands thèmes inscrits dans la stratégie nationale de santé du gouvernement: prévention, organisation des soins et droit des patients.
Le tabac, l'une des cibles principales de la politique de prévention, devrait être évoqué jeudi, lors de la présentation aux professionnels du milieu médical de l'avant-projet de loi. Mais la ministre pourrait réserver ses annonces à la remise, dans les semaines à venir, du "Plan national de réduction du tabagisme", demandé par François Hollande lors du lancement du troisième Plan Cancer en février.
L'introduction de paquets neutres, sans logo ni couleur attractive, et l'interdiction des cigarettes électroniques sont des pistes possibles. Marisol Touraine, qui prévoit des "mesures fortes", déclarait fin mai que "toutes une série d'options" était à l'examen.
Toujours en matière de prévention, la création de codes nutritionnels sur les aliments est à l'étude. Des étiquettes de couleur sur les emballages préciseraient si le produit est plus ou moins gras ou équilibré, et ce pour "éviter de manger trop gras, trop salé, trop sucré". Le projet du Pr Serge Hercberg, soutenu par 31 sociétés savantes, associations de professionnels de santé et de la nutrition, acteurs de terrain, consommateurs et patients, se heurte à l'hostilité des industriels.
- Tiers payant généralisé -
Autre sujet sensible: l'expérimentation de "salles de consommation de drogue à moindre risque". Le projet d'une "salle de shoot" à Paris avait été reporté début octobre, le conseil d'Etat recommandant au préalable l'adoption d'une loi. Mme Touraine avait alors affirmé que le gouvernement présenterait un projet de loi afin de "sécuriser juridiquement" ces salles.
La loi pourrait aussi mettre en place les actions de groupe concernant la santé. La ministre de la Santé s'est déjà déclarée "favorable" à l'instauration à ce type d'actions dans le champ de la santé et avait annoncé qu'elle présenterait début 2014 un projet de loi spécifique en ce sens.
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Jeudi, des mesures déjà annoncées devraient être confirmées, à commencer par le tiers payant généralisé.
Pour faciliter l'accès aux soins, d'ici à 2017, les patients n'auront plus à avancer d'argent lors d'une consultation médicale, ce qui se fait déjà en pharmacie. Ce devrait être le cas avant la fin 2014 pour les plus modestes, bénéficiant de l'aide pour une complémentaire santé (ACS). Cette disposition, contestée par des syndicats de médecins, devrait s'appliquer "par étapes", car "c'est techniquement assez compliqué", avait expliqué à l'automne Mme Touraine.
L'hôpital, sollicité dans le plan d'économies du gouvernement à hauteur de deux milliards pour la rationalisation des dépenses (achats, coopérations, etc...) et d'un milliard d'euros via des séjours raccourcis, sera aussi au cœur de cette réforme.
Modification de la gouvernance, régulation des médecins mercenaires, formation et négociations et conditions de travail seront au menu.
La loi redéfinira aussi le principe de service public hospitalier et les modalités de participation du privé.
La ministre veut "changer les pratiques" et "pousser à la coopération" entre acteurs du privé et du public, avec pour objectif de repenser le parcours de soins autour du patient.
Elle a déjà cité deux exemples de la coopération qu'elle appelle de ses vœux: une lettre de liaison remise aux patients à leur sortie de l'hôpital et la relance du dossier médical personnalisé -- carnet de santé informatique recensant les antécédents médicaux --, pour l'instant peu utilisé.