La cour d'appel de Paris a examiné lundi la demande de Marc Machin, victime d'une erreur judiciaire qui lui a valu 2.126 jours de détention injustifiée et qui réclame à l'Etat près de deux millions d'euros d'indemnisation.
Condamné par deux fois aux assises, en 2004 et 2005, pour le meurtre de Marie-Agnès Bedot le 1er décembre 2001 sur le pont de Neuilly (Hauts-de-Seine), le jeune homme a finalement été acquitté en décembre 2012, au terme d'un troisième procès.
Entre temps, le véritable auteur du meurtre, David Sagno, s'était constitué prisonnier en mars 2008, ce qui avait permis l'annulation de la condamnation de Marc Machin par la Cour de révision.
"Ce qui a été fait est fait. On ne peut pas faire marche arrière, hélas", a dit Marc Machin, présent à l'audience et en proie à une émotion extrême.
Lors de sa plaidoirie, son avocat, Me Louis Balling, a revisité le terrible parcours de ce jeune adulte, interpellé à 19 ans et qui, épuisé par sa garde à vue, avait avoué les faits tout en étant incapable de décrire le meurtre.
Accusé du meurtre d'une femme, fils de policier, Marc Machin n'a jamais décrit en détail ce qu'il avait vécu en détention mais l'administration pénitentiaire avait observé que "le reste de la population carcérale (souhaitait) exercer des représailles" sur lui, a rappelé Me Balling.
Son père, qui lui rendait régulièrement visite, a notamment constaté lors d'un parloir qu'il avait le visage tuméfié.
"La prison, ça a été difficile... plus que difficile", a expliqué Marc Machin, qui s'est plusieurs fois effondré en sanglots, peinant à masquer sa très grande nervosité.
Dans le détail, le principal poste d'indemnisation concerne le préjudice moral, celui lié à la détention pour 1,06 million et celui lié à sa double condamnation ainsi qu'à la longueur de la procédure (11 ans) pour 800.000 euros, a expliqué Me Balling.
En y ajoutant l'indemnité demandée pour préjudice matériel, qui correspond principalement aux revenus qu'aurait perçus Marc Machin s'il avait été libre et avait exercé une profession, le total se monte à 1,997 million d'euros.
Le conseil a également réclamé 150.000 euros chacun pour le père, la soeur et le frère de Marc Machin.
Le père, qui se nomme également Marc, a dû abandonner son activité professionnelle et fait face à une profonde dépression, la soeur a rompu avec lui car elle le croyait coupable et n'a pas vraiment renoué depuis, tandis que le frère a fait une tentative de suicide.
"Je ne peux pas m'empêcher de souligner le courage de Marc Roger (son deuxième prénom) Machin dans cette procédure et son courage d'être là, ici", a déclaré l'avocate générale, Lydia Görgen, qui n'a pas évoqué de montant mais conclu à un "préjudice moral extrêmement important".
La décision a été mise en délibéré au 30 juin.
Loïc Sécher reste, à ce jour, la victime d'erreur judiciaire ayant perçu l'indemnité la plus importante, soit 797.352 euros. Il avait passé 7 ans et 3 mois en détention en lien avec un viol qu'il n'avait pas commis.
Depuis sa libération en attente de l'examen de sa demande de révision, en 2008, Marc Machin a été condamné, en 2010, à trois ans d'emprisonnement pour trois agressions sexuelles, puis de nouveau en 2013 pour vol et violences.
"Je vais essayer de trouver du travail, essayer de prendre des bonnes résolutions et de m'y tenir", a professé Marc Machin en fin d'audience.