Prévenir la dépendance dès 50 ans sans attendre que les handicaps deviennent irréversibles : l'Académie de médecine a jeté un pavé dans la mare alors que le nombre de personnes dépendantes dépasse déjà le million et pourrait doubler d'ici à 2060 en France.
"C'est aux alentours de 50 ans que les premiers signes devraient être détectés et des mesures prises pour éviter la fragilisation effective le plus souvent constatée après 65 ans", souligne l'Académie dans un rapport qui vient d'être rendu public.
Elle préconise une consultation spécifique "à mi-vie" intégralement prise en charge par l'Assurance maladie, prévoyant une évaluation des "fragilités" qui risquent de conduire à la dépendance.
Même s'il reste très difficile de prévoir le nombre de personnes dépendantes à l'avenir, leur nombre devrait rapidement augmenter au cours des prochaines années, parallèlement à l'allongement de la durée de la vie.
Un groupe de travail sur la dépendance mis en place par le gouvernement a anticipé un doublement du nombre de bénéficiaires de l'Allocation personnalisée d'Autonomie (APA) en France métropolitaine, soit 2,3 millions en 2060.
Mais la prise en charge continue à intervenir tardivement, ce qui limite son efficacité et augmente son coût, selon l'Académie de médecine qui préconise une intervention précoce "comme on le fait en cancérologie ou en médecine vasculaire".
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Car bien avant que des signes évidents de vieillissement apparaissent, le corps enregistre une perte de la masse, de la force et de la fonction musculaire squelettique (ou sarcopénie) qui s'accélère à partir de l'âge de 40 ans, bien avant l'âge de la retraite.
Cette évolution est généralement silencieuse, mais signe une "pré-fragilité" lorsqu'elle est combinée à d'autres signes tels que la fatigue, une diminution de l'appétit ou de la force de préhension ou encore un ralentissement de la vitesse de marche.
- Situation 'potentiellement réversible' -
A ce stade toutefois, la situation est encore "potentiellement réversible", selon l'Académie qui cite des études montrant les bienfaits de l'exercice physique, mais également d'une alimentation saine et équilibrée ainsi que d'un arrêt du tabac. Elle recommande aussi "fortement" un travail intellectuel "de type double tâche".
De nombreux traitements sont par ailleurs à l'étude pour "renforcer la réversibilité", portant notamment sur des médicaments à visée cardio-vasculaire, des supplémentations d'hormones ou de vitamine D ou en acides aminés essentiels, comme l'arginine et la lysine.
Selon une récente étude française réalisée sur 1.445 personnes de plus de 45 ans, en bonne santé, près de 10% des 45-54 ans présentaient des signes de sarcopénie.
Mais une autre étude française publiée l'an dernier dans la revue European Journal of Public Health inquiète les spécialistes : elle montre que pour la première fois depuis 40 ans, les incapacités fonctionnelles ont recommencé à augmenter dans les années 2000 chez les hommes comme chez les femmes âgées de 50 à 65 ans.
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Le même phénomène, précise l'étude réalisée par des spécialistes de vieillissement de l'Inserm, s'observe chez les plus de 65 ans qui vivent de plus en plus longtemps, mais 16 années de leur vie en moyenne sont marquées par des limitations physiques ou sensorielles et 10 années par des atteintes cognitives.
En dépistant les tout premiers signes de la dépendance à l'âge moyen de la vie, l'Académie espère améliorer "l'espérance de vie en bonne santé" après 65 ans qui stagne actuellement en France comme dans la plupart des pays européens.
Elle cite l'exemple du Gérontopôle de Toulouse qui a décidé de sensibiliser la population en diffusant par la presse un questionnaire destiné aux populations concernées : dès lors qu'elles répondent positivement à une ou plusieurs questions, elles sont invitées à consulter leur médecin traitant qui décide de la nécessité ou non de faire une évaluation plus poussée de leur état fonctionnel.
Mais plutôt que de se limiter à dépister des personnes très âgées (la moyenne des personnes ayant consulté à Toulouse jusqu'à fin 2013 tournait aux environs de 82 ans), l'Académie de médecine préconise de l'étendre aux 50-60 ans, la tranche d'âge dans laquelle "l'impact" des interventions possibles est "maximum".