L'ancien trader Jérôme Kerviel, qui doit franchir samedi la frontière italo-française à Menton à l'issue d'une marche commencée à Rome en février, se déclare "serein" malgré la perspective de la "terrible" privation de liberté qui l'attend en France, a-t-il dit vendredi à France Bleu Azur.
"Je suis totalement serein sur le futur, je n'appréhende pas du tout le passage à la frontière", déclare Jérôme Kerviel, qui se dit fatigué après deux mois et demi de marche en Italie, heureux de retrouver son avocat David Koubbi et son comité de soutien.
"Je n'essaie pas de faire de plan ou d'imaginer ce qui va se passer demain" (samedi), a-t-il affirmé en direct vendredi matin d'un hôtel proche de la ville-frontière italienne de Vintimille.
Il n'a pas révélé s'il se rendrait de son plein gré au commissariat de police de Menton. "Aujourd'hui je vais marcher, ce soir (vendredi) je vais retrouver mon avocat, mon comité de soutien et on va parler".
Le parquet général de Paris l'a convoqué, dimanche soir au plus tard, au commissariat de Menton. Faute de présentation, il sera requis "l'assistance de la force publique" afin de le forcer à exécuter sa peine d'emprisonnement.
"Evidemment qu'on craint la prison", dit-il au micro de France Bleu Azur, "la privation de liberté est quelque chose de terrible". Jérôme Kerviel a été condamné à cinq ans de prison dont trois ferme. Il a déjà purgé 41 jours en détention provisoire.
"La liberté est avant tout à l'intérieur de l'esprit, je suis libre complètement aujourd'hui de ce point de vue là", ajoute M. Kerviel.
"J'ai été quelqu'un qui a participé à un système amoral, je ne m'en rendais pas compte à l'époque. Aujourd'hui j'ai honte d'y avoir participé. J'ai honte d'avoir été un trader", dit-il. "Mon quotidien c'était de faire du fric pour la banque, c'était mon seul objectif, à tout prix, peu importe la morale, peu importe l'éthique", affirme-t-il encore.
"Au cours de ce périple en Italie, j'ai rencontré des gens qui ont souffert de la crise provoquée en grande partie par les banques. J'ai de nombreux messages de commerçants et d'artisans chaque jour qui me disent quelles difficultés ils ont avec leur banque qui ne leur prête plus", ajoute-t-il.
Dans une lettre ouverte au président de la République, publiée vendredi par le quotidien l'Humanité, Me Koubbi rappelle le chef de l'Etat à ses déclarations de janvier 2012, lorsque le candidat Hollande présentait le monde de la finance comme son "véritable adversaire".
Il attire également son attention sur l'absence d'expertise indépendante sur les conditions de la perte de 4,91 milliards d'euros déclarée par Société Générale, qui a été systématiquement refusée à Jérôme Kerviel et ses conseils.
Outre David Koubbi, l'évèque de Gap et d'Embrum, Mgr Jean-Michel di Falco, et le sénateur communiste Eric Bocquet ont également écrit, cette semaine, à François Hollande, lui demandant d'intercéder pour que Jérôme Kerviel ne soit pas incarcéré dans l'immédiat.