Réunis pour la première fois à Colombey-les-Deux-Eglises, une cinquantaine de harkis et leurs descendants ont réclamé samedi la reconnaissance officielle de la responsabilité de la France dans le massacre et l'abandon après la guerre d'Algérie de ces supplétifs de l'armée française, a constaté l'AFP.
"C'est le lieu symbolique pour exiger une loi reconnaissant enfin notre souffrance, car si le général De Gaulle a été un grand homme pour la France, il a été à l'origine de tous nos malheurs", a expliqué à l'AFP Boaza Gasmi, le président du Comité national de liaison des harkis (CNLH) avant de prendre la parole dans la salle des fêtes du village.
"Nous attendons du président Hollande des gestes forts et hautement significatifs car notre cause est noble et digne de la République que nos pères ont servie", a-t-il déclaré devant quelques anciens "soldats musulmans", drapeau tricolore en main et buste bardé de médailles, et beaucoup d'enfants de harkis souvent émus à l'évocation des massacres de leurs familles restées en Algérie.
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"Il faut que le président honore sa parole au plus tôt car sinon en 2017, nous lui réservons une surprise dans les urnes", a-t-il prévenu, aux applaudissements de la petite assemblée.
En avril 2012, durant la campagne présidentielle, François Hollande s'était engagé "à reconnaître publiquement les responsabilités des gouvernements français dans l'abandon des harkis, le massacre de ceux restés en Algérie et les conditions d'accueil des familles transférées dans des camps en France".
Le 25 septembre 2012, il a reconnu la "faute" de la France dans "l'abandon" des harkis, un geste jugé insuffisant par les associations qui attendent un décret ou l'inscription de cette reconnaissance dans la loi.
Pendant la réunion, le CNLH a reçu le soutien "fraternel" de Bernard Coll, le secrétaire général de l'"Association des jeunes pieds-noirs", qui a dénoncé le "crime contre l'humanité de De Gaulle contre les harkis" avant que l'assemblée se rende pour une minute de silence et une Marseillaise devant le monument aux morts de Colombey, sur la place de l'église, à 50 mètres du cimetière où se trouve la tombe du général.
Au lendemain des accords d'Evian du 18 mars 1962 consacrant le retrait français d'Algérie, 75.000 à 150.000 harkis ont, selon les sources, été abandonnés en Algerie victimes de sanglantes représailles. Quelque 30.000 à 60.000 ont été admis en France, logés dans des camps de fortune.
Les harkis et leurs descendants représentent aujourd’hui quelque 500.000 personnes en France. Depuis 1974, leurs enfants ont mené des grèves de la faim et des marches de protestation pour obtenir la reconnaissance de leur drame et une amélioration de leur sort.