Nicolas Cano, 30 ans, a raconté jeudi à la cour d'assises de l'Isère comment il en était venu à penser que sa belle-mère, surnommée "la veuve noire de l'Isère", était impliquée dans la mort de son père en 2008.
Costume gris, chemise noire et cheveux ras, il est apparu très ému à la barre, retenant à plusieurs reprises ses sanglots. "Mon papa, c'était toute ma vie, c'était tout pour moi, c'était mon modèle", a-t-il dit.
Quand le corps de Daniel Cano, chaudronnier de 58 ans, est retrouvé calciné dans sa voiture incendiée, à la veille de la Toussaint, Nicolas Cano commence par se "raccrocher" à sa belle-mère, avec laquelle il vit depuis 17 ans. "Il ne me restait plus qu'elle. C'était la deuxième personne la plus importante dans ma vie", raconte-t-il. Sa mère et sa grand-mère étaient mortes quelques mois plus tôt.
Manuela Gonzalez se comporte alors comme une mère, s'occupant de son linge, faisant ses courses. "Des relations saines", décrit-il.
Ce n'est que début 2009 que les premiers "doutes" s'installent, quand Nicolas apprend auprès du juge d'instruction qu'il n'est pas partie civile dans le dossier et que sa belle-mère lui a "menti".
Des souvenirs lui reviennent alors sur un premier incendie survenu un mois avant le drame, dans lequel son père avait déjà failli mourir. Le feu était censé avoir été provoqué par une bougie allumée dans la chambre conjugale, renversée par le chien de la famille.
Mais Nicolas affirme avoir entendu son père lancer quelques jours plus tard: "Manuela, arrête de me prendre pour un con, il n'y avait pas de bougie dans ma chambre". "C'est totalement faux", rétorque l'accusée à la barre. "S'il avait eu le moindre soupçon sur moi, (Daniel) ne serait pas resté une minute de plus avec moi".
- "Il y a eu un électrochoc" -
Puis Nicolas raconte avoir entendu son père prononcer le mot "divorce" en apprenant que sa femme avait contracté à son insu un prêt hypothécaire de 165.000 euros. "Jamais de la vie!", lance l'accusée. "Jusqu'à ce que mon papa apprenne pour ce crédit, pour moi c'était un couple normal. Après il y a eu un électrochoc, des tensions", assure le beau-fils.
Depuis novembre 2009, Nicolas Cano n'a plus eu aucun contact avec Manuela Gonzalez, ni avec sa fille Virginie, qu'il considérait "comme sa soeur".
En mars 2010, Manuela Gonzalez était mise en examen et écrouée, à la suite notamment des déclarations de son beau-fils. Quelques mois plus tard, elle affirmait au juge avoir entendu des éclats de voix entre Nicolas et son père le soir du drame. Jusqu'alors, elle assurait n'avoir jamais rien entendu.
A la barre, elle a aussi évoqué une "preuve irréfutable", assez énigmatique, liée à une tronçonneuse disparue qu'elle aurait retrouvée dans la cave de son beau-fils.
"Je me suis posé des questions mais je n'ai jamais dit, attention, que mon beau-fils était coupable de quoi que ce soit", a-t-elle dit à l'avocat général. "On ne peut pas accuser quelqu'un quand on n'a pas vu la personne faire quoi que ce soit. Pour accuser, il faut avoir un minimum de preuves", a-t-elle ajouté.
Dans cette affaire, l'accusation dispose de nombreux indices troublants mais ni preuves matérielles ni témoignage déterminant à l'encontre de cette femme de 53 ans, dont le passé amoureux, déjà émaillé de morts violentes, lui vaut son surnom de "veuve noire".
Verdict vendredi.