Les députés ont adopté dans la nuit de lundi à mardi une batterie de mesures visant à renforcer les droits des consommateurs, faciliter leurs démarches et préserver leur pouvoir d’achat.
L’objectif du gouvernement était clair. Le projet de loi sur la consommation, porté depuis plusieurs mois par Benoît Hamon, ministre en charge de l’Economie sociale et solidaire a été voté dans la nuit de lundi à mardi en seconde lecture à l’Assemblée nationale. Il vise à «rééquilibrer les pouvoirs entre consommateurs et professionnels».
En restaurant la confiance et préservant le pouvoir d’achat des premiers, le chef de l’Etat, François Hollande, espère ainsi relancer une économie en berne. Rejeté par l’UMP, le texte a en revanche été approuvé par les socialistes, les écologistes et les radicaux de gauche. L’UDI s’est abstenue. Le texte sera de nouveau examiné au Sénat début 2014.
En tout, ce sont quelque 70 dispositifs qui ont été validés, dont certains, à l’instar des actions de groupe devant la justice, faisaient partie des promesses de campagne du candidat Hollande. De la libéralisation du marché des lunettes à la création d’un label «fait maison» pour les restaurateurs, en passant par l’encadrement du e-commerce, la vie quotidienne des Français devrait s’en trouver changée.
> Actions collectives en justice
C’est une vieille revendication des associations, inspirée des «class actions» à l’américaine. Il sera désormais possible, pour un groupe de consommateurs s’estimant lésés, de saisir la justice collectivement. Pour éviter les dérives, ces actions de groupe s’effectueront par l’intermédiaire de l’une des seize associations de consommateurs agréées au niveau national.
Une façon d’éviter les jugements à répétition et de faciliter les procédures, tout en encourageant les clients, souvent réticents, car isolés, à faire valoir leurs droits.
Mais les litiges relevant des domaines de la santé et de l’environnement ont pour l’heure été écartés. De plus, les plaignants ne pourront obtenir que la réparation du préjudice subi, sans dommages et intérêts punitifs.
> Des lunettes moins chères
Les opticiens grincent des dents. La vente en ligne des lentilles et des lunettes correctrices sera désormais encouragée. En effet, un ophtalmologue aura l’obligation d’inscrire l’écart pupillaire (la distance entre les deux yeux) d’un patient sur son ordonnance.
Cela facilitera l’achat de soins visuels sur Internet, puisque les e-opticiens pourront faire des réglages à distance. Selon Benoît Hamon, cette mesure permettra de faire baisser de 30 à 40 % le prix des paires de lunettes, qui s’élève aujourd’hui à 470 euros en moyenne dans l’Hexagone.
Les opticiens, quant à eux, y voient la stigmatisation d’une profession et une menace pour leur activité.
> Un frein au gaspillage
Bête noire des consommateurs, l’obsolescence programmée des produits est dans le viseur du gouvernement. Cette stratégie consiste à réduire la durée de vie des appareils afin de pousser les acheteurs à les remplacer.
Pour lutter contre ce gaspillage et encourager une consommation responsable, la loi obligera les fabricants à informer les consommateurs de l’existence et de la disponibilité de pièces détachées, qu’ils s’engageront à fournir.
Cette mesure, en encourageant la réparation des produits défaillants, doit permettre de faire des économies.Mais aussi de soutenir les entreprises du commerce de pièces détachées, qui sont souvent des structures d’insertion, acteurs majeurs de l’économie sociale et solidaire.
> Les e-acheteurs protégés
Conditions de paiement mal définies, délais de livraison trop longs… sur Internet, les consommateurs ne bénéficient pas toujours des mêmes garanties qu’en magasin. Le projet de loi entend renforcer les droits des web-acheteurs en allongeant leur délai de rétractation.
Ils auront désormais 14 jours pour retourner un article acheté sur la Toile, au lieu de 7 actuellement. Les délais de livraison, quant à eux, ne pourront pas excéder 30 jours à compter de l’achat, alors qu’il n’existe aujourd’hui aucune règle pour les limiter.
Enfin, les sites internet sont tenus d’indiquer, de manière «lisible et compréhensible», un certain nombre d’informations, notamment les moyens de paiement acceptés. Autant de mesures qui doivent permettre de rassurer les consommateurs les plus craintifs et d’encourager le commerce en ligne.
> La résiliation facilitée
Aujourd’hui, résilier un contrat d’assurance nécessite de s’armer de patience… et d’un calendrier. Ce n’est possible qu’à l’échéance du contrat, après l’envoi d’un courrier recommandé plusieurs semaines à l’avance. Pour faciliter les démarches des consommateurs, la loi permettra aux assurés de résilier quand ils le désirent sans frais ni pénalités.Seules conditions : respecter une durée d’engagement d’un an et présenter la preuve de la souscription à un nouveau contrat.
Un label "fait maison"
Comment savoir si les frites à la carte ne sont pas sorties d’un sachet surgelé ? Pour se distinguer, les restaurateurs et les sociétés de vente à emporter qui proposent des plats maison auront l’obligation de le préciser.
Toute utilisation frauduleuse de ce label «fait maison» entraînera des sanctions pénales.
Si les modalités d’application exactes de cette mesure seront précisées ultérieurement par décret, l’objectif affiché du gouvernement est de répondre au besoin de transparence des consommateurs. Elle permettra en outre de valoriser le travail des professionnels de la gastronomie.
> Le stationnement à la minute près
Rageant de payer deux heures de parking quand on reste 1h02 ? Ce ne sera plus un problème à partir du 1 er janvier 2016. Le projet de loi prévoit de généraliser la tarification à la minute pour tous les exploitants de parcs de stationnement à usage public. Une mesure qui doit permettre aux consommateurs de faire des économies, alors que l’association de consommateurs UFC-Que Choisir révélait, dans une enquête publiée en septembre dernier, que 54 % des parkings pratiquent la tarification à l’heure.
Selon elle, le gain d’un paiement à la minute pour les porte-monnaie des automobilistes atteindrait 16,3 %. En outre, cela permettrait de désengorger les parkings en favorisant les stationnements de courte durée.
> Une lutte contre les clauses abusives
Qui n’a pas déjà eu de mauvaise surprise en oubliant de lire les dernières lignes d’un contrat ? Le gouvernement entend lutter contre les clauses abusives, qui créent un déséquilibre en faveur des professionnels et au détriment des consommateurs lors de la signature d’un contrat.
Par exemple, le tribunal a jugé abusive une clause qui permettait à un site de vente en ligne de refuser de reprendre un objet acheté sous prétexte que son emballage était abîmé.
Désormais, lorsque cela sera sanctionné par un juge, la Direction générale de la concurrence et les associations de consommateurs auront la possibilité de demander la suppression de la clause dans tous les contrats similaires à celui qui a fait l’objet d’une procédure. Même les consommateurs n’ayant pas saisi la justice seront donc protégés.
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