Un ex-gendarme jugé lundi par les assises de la Haute-Garonne pour la mort d'une femme de 97 ans est-il innocent ou a-t-il voulu se servir de son passé d'enquêteur pour tenter d'échapper à la justice ?
Depuis son arrestation il y a trois ans, Daniel Bedos, 57 ans, dément catégoriquement s'être introduit chez Suzanne Blanc le 18 août 2010 à Toulouse, encore plus lui avoir volé des bijoux et l'avoir frappée.
Ce n'est que le lendemain matin de l'agression que la victime, qui était encore autonome malgré son âge, avait été retrouvée par son infirmière allongée sur le sol, le visage tuméfié.
"C'est dire qu'elle a passé une nuit d'agonie et que celui qui a frappé était parfaitement conscient de la situation dans laquelle il a laissé cette pauvre femme", a rappelé l'avocat de la fille de la victime, Me Georges Catala. La quasi-centenaire a succombé le lendemain à un "traumatisme cranio-facial grave".
Un tueur comme bouc émissaire
Domicile fouillé, bijoux volés: les enquêteurs sont rapidement convaincus d'avoir affaire à un vol qui a mal tourné et concentrent leurs efforts sur la revente du butin.
Ils en trouvent la trace dans un magasin Cash Converters où un certain Daniel Bedos est venu les mettre en vente dès le lendemain de l'agression de Mme Blanc, pour 1.231 euros. L'employé le reconnaît formellement et Daniel Bedos, gendarme ayant accompli l'essentiel de sa carrière en Midi-Pyrénées avant de prendre sa retraite, est arrêté. D'autres bijoux appartenant à la victime sont retrouvés chez les parents du gendarme.
Tout accable Daniel Bedos mais celui-ci, s'il varie dans ses déclarations, reste constant sur un point: oui, il est coupable de recel de vol, non il n'a pas tué Mme Blanc.
Il accuse un client du PMU "le Gaulois", qu'il fréquente régulièrement, de lui avoir revendu les bijoux.
Le profil de ce dernier retient l'attention des enquêteurs: alcoolique aux antécédents psychiatriques, n'a-t-il pas été condamné 10 ans plus tôt aux assises pour homicide ?
Celui-ci est mis en examen, part en détention provisoire, mais est finalement mis hors de cause.
Les enquêteurs apprennent de l'ex-compagne de l'ancien gendarme qu'il s'est procuré un portable en prison, qu'il lui aurait avoué avoir tué la vieille dame et lui aurait demandé de témoigner en sa faveur.
"Ils n'ont aucune bille"
La ligne est placée sur écoute. De sa cellule, Daniel Bedos fait preuve d'un aplomb à toute épreuve, analysant froidement chaque étape de l'enquête, comme dans cette conversation avec son ex-compagne en octobre 2010 au sujet des enquêteurs: "Ils n'ont rien, ils n'ont aucune bille (...) il n'y a pas de témoin, il n'y a rien".
Dans un autre message, il voit des raisons objectives d'espérer: "dossier vide... aucune empreinte pour moi, ni ADN. Je vais m'en sortir".
De fait, le dossier ne contient pas de preuve matérielle de la présence de l'accusé chez Mme Blanc et la seule empreinte génétique suspecte retrouvée appartenait à un des enquêteurs présents sur la scène de crime.
Daniel Bedos ne nie pas avoir été en possession des bijoux, dit l'un de ses avocats, Me Alexandre Parra-Bruguière, "il se doutait bien que leur origine n'était pas claire mais il avait besoin d'argent. Par ailleurs, je relève qu'il ne prend pas beaucoup de précautions pour les revendre".
Les écoutes ont révélé les pressions du gendarme sur son ex-compagne pour qu'elle se présente comme la propriétaire des bijoux: "C'est pas ça que je te demande ma puce, on s'était mis d'accord avant que les flics t'appellent (...) voilà, tu diras ça, qu'il te manque deux colliers, deux bracelets".
Le procès débute lundi matin avec l'examen de la personnalité de l'accusé. Le verdict est attendu mercredi.