Des centaines de salariés de Michelin ont exprimé leur colère mercredi dans les rues de Clermont-Ferrand, face au nouveau plan de restructuration menaçant 730 emplois à l'usine de Joué-lès-Tours (Indre-et-Loire), au moment où se tenait un comité central d'entreprise extraordinaire.
La manifestation a rassemblé environ 2.000 personnes, selon les syndicats, 750 selon la préfecture.
450 salariés de l'usine de Joué-les-Tours (Indre-et-Loire) avaient fait le déplacement pour dire "non à la fermeture de Tours" à l'occasion de cette manifestation appelée par la CGT et Sud. Simultanément un mouvement de grève était observé dans toutes les usines du groupe.
Des délégations de Bourges, Troyes, Le Puy, Montluçon, Cholet, Bourges ou encore Montceau-les Mines étaient également présentes dans le cortège aux côtés de leurs collègues de Clermont.
Après s'être rassemblés à proximité de l'usine historique du groupe pneumatique, les salariés se sont rendus en cortège au siège social, distant de quelques centaines de mètres, derrière une banderole "Joué-les-Tours doit vivre" et aux cris de "non aux licenciements, aucune fermeture d'usine".
Vêtus pour beaucoup de T-shirts noirs représentant un Bibendum fauchant des ouvriers, les manifestants se sont montrés très mécontents de l'annonce par Michelin d'arrêter la production de pneus poids lourds dans l'usine de la banlieue tourangelle, pour la transférer en partie à La Roche-sur-Yon, mais surtout dans d'autres usines européennes.
"On ne peut plus faire confiance à Michelin, car depuis des années c'est la casse sociale", disait Olivier Coutin, le secrétaire du CE (Sud) de l'usine de Joué, résumant un sentiment largement répandu.
"Depuis des années, les salariés de Michelin ne vivent que des plans sociaux à répétition", renchérissait son collègue de la CGT Claude Guillon, rappelant que le site tourangeau a déjà fait l'objet d'une restructuration en 2009.
Mort programmée
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Pour tous, le départ de l'activité poids lourds et le maintien de 200 emplois seulement contre 930 aujourd'hui signifie à terme la mort programmée de l'usine, qui ne bénéficiera pas, selon eux, des 800 millions d'euros d'investissements annoncés par le groupe en France.
"Les gars sont en colère. Michelin a fait 2,4 milliards de bénéfices en 2012 et nous on n'a rien et on ferme des usines comme celle de Joué qui est viable. Notre priorité c'est de dire non à la fermeture et oui au maintien des emplois", affirmait Jean-Michel Denis, secrétaire du syndicat CGT de Michelin à Clermont.
la plupart des salariés de l'usine tourangelle refusent les mesures de mobilité envisagées. "Hors de question qu'on quitte Tours", affirmait Mike, un trentenaire, qui comme beaucoup "a sa vie" dans la région et "vient de faire construire".
Arrivés devant le siège social du géant du pneumatique, où se déroulait le Comité central d'entreprise extraordinaire, une partie des manifestants, souvent des jeunes, a laissé éclater sa colère.
Après quelques jets d’œufs sur la façade, ils ont tenté d'arracher le rideau métallique protégeant l'entrée. De brefs incidents les ont opposés au service de sécurité de l'entreprise, qui a repoussé les manifestants à l'aide de gaz lacrymogènes. Un manifestant, légèrement blessé, a été secouru par les pompiers.
Le CCE extraordinaire, qui avait commencé le matin, a été interrompu durant la manifestation à la demande des syndicats. Il devait reprendre dans l'après-midi.
Il est destiné, selon la direction de Michelin, à présenter les raisons économiques de la réorganisation de l'activité poids-lourds, ainsi que les premières mesures d'accompagnement social, notamment en ce qui concerne les départs anticipés.
La direction du groupe Michelin a affirmé mercredi la volonté de "trouver une solution pour tous" les salariés de l'usine de Joué-lès-Tours.
Pour Stéphane Roy de Lachaise, directeur du service du personnel de Michelin France, le regroupement dans l'usine de Vendée était "indispensable" pour maintenir la fabrication de pneus poids lourds en France.
"Ce marché a baissé de 25% depuis 2007 et le groupe doit s'adapter" à cette situation "en regroupant la production sur un seul site, moderne et de taille suffisante pour se comparer avec les sites de la concurrence, a-t-il expliqué à l'AFP. "Les volumes produits en France ne vont pas changer", a-t-il dit.
Il a d'autre part souligné que "l'usine de Joué-lès-Tours ne ferme pas". Elle continuera à produire des membranes et du calandrage, avec 200 salariés.
Selon un accord de méthode élaboré entre la direction et les organisations syndicales, les discussions doivent se poursuivre, à Clermont-Ferrand et à Joué-lès-Tours, jusqu'à la deuxième quinzaine de novembre.