Les inspecteurs de l'Agence du médicament (ANSM) n'avaient toujours pas mardi percé le mystère de l'erreur de conditionnement des boîtes de diurétique Furosémide du laboratoire Teva qui pourrait être liée à trois décès et à deux hospitalisations, en dépit de leurs inspections.
L'inspection de l'ANSM sur le site de ce groupe pharmaceutique israélien à Sens (Yonne) d'où sont sorties les boîtes dont certaines contenaient des cachets de somnifère Zopiclone au lieu du diurétique, a pris fin mardi soir, sans qu'aucun dysfonctionnement n'ait été décelé, selon l'ANSM.
"Les quatre inspecteurs n'ont pas identifié de défaut ni dans l'organisation, ni dans les pratiques, ni dans l'équipement de l'usine de conditionnement de Sens", a ajouté auprès de l'AFP l'agence sanitaire notant que "l'enquête se poursuit par ailleurs avec les autorités judiciaires".
"Les comprimés de furosémide proviennent de Hongrie et sont mis en plaquettes et en boîtes dans cette usine", tandis que le somnifère "zopiclone provient d'Espagne", indique-t-elle.
Les diurétiques tel le Furosémide de Teva sont indiqués pour traiter l'hypertension artérielle, les oedèmes d'origine cardiaque, rénale ou hépatique et l'arrêt brutal du traitement peut présenter des risques.
Les inspecteurs avaient entamé leur inspection lundi en interrogeant le personnel et en examinant les dossiers administratifs des lots de boîtes de Furosémide incriminés, avant de passer mardi aux lignes de production.
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De son côté, la direction de Teva, numéro un mondial des médicaments génériques, n'a fait aucune déclaration tandis que le personnel s'est abstenu de tout commentaire à l'entrée du site.
Le secrétaire départemental de la CFDT, Julien Leclerc parle, lui, d'une "ambiance malsaine". "Il y a eu un gros incident, à cause d'une faute. J'espère qu'elle est involontaire. Et si c'est le cas, cela veut peut-être dire que des procédures manquent", explique-t-il.
Aucune explication n'a été avancée, alors qu'un expert en pharmacie, le Pr François Chast (hôpital Cochin), jugeait lundi qu'une malveillance était une "hypothèse possible" pour expliquer la présence de quelques somnifères seulement dans certaines des boîtes du diurétique.
Afflux de signalements
Pour éviter toute méprise de la part de patients et à titre de précaution, l'Agence a ordonné lundi soir en accord avec le laboratoire le rappel de tous les lots de Furosémide 40 mg Teva. Dans un premier temps, vendredi soir, seulement deux lots (représentant 190.000 boîtes) avaient été rappelés.
Sur le numéro vert d'information pour le grand public mis en place par Teva (0800 51 34 11), "les appels que nous recevons des patients démontrent qu'un certain nombre d'entre eux ont des difficultés à identifier les numéros des lots", a argumenté Erick Roche, président de Teva France.
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Le bilan officiel de l'ANSM s'en tient pour l'instant à trois cas notifiés. Mais "il y a des cas qui remontent de partout", encore non vérifiés et non confirmés, a commenté mardi une porte-parole de l'Agence.
"Les signalements affluent de toutes parts (...). Tout le monde en reçoit: les hôpitaux, les ARS (Agences régionales de santé, ndlr), le ministère (de la Santé, ndlr) et l'ANSM. Mais après il faut pouvoir les croiser", à savoir procéder à des vérifications, a-t-elle expliqué.
Après l'annonce dimanche d'un premier décès à Marseille, peut-être lié à l'erreur de conditionnement, l'ANSM a fait état lundi de "deux nouveaux signalements de pharmacovigilance" avec "un décès et un cas grave".
L'un des deux nouveaux cas serait une patiente de 73 ans hospitalisée en réanimation au CHRU de Tours pour des complications, à la suite de la prise de Furosémide.
Le parquet de Privas (Ardèche) a ouvert lundi une enquête après le décès le 4 juin dans un hôpital drômois d'une octogénaire qui, selon ses proches, aurait pris du Furosémide Teva. Ce dernier cas ne fait pas partie des trois répertoriés par l'ANSM.
En outre, on apprenait mardi auprès de l'Agence régionale de santé (ARS) de Bourgogne qu'un septuagénaire traité par le diurétique Teva avait été hospitalisé pour somnolence lundi à l'hôpital de Joigny (Yonne), ce qui porterait à cinq le nombre total de cas suspects.