Le pasteur Laurent Schlumberger, élu samedi à Lyon président de la nouvelle Église protestante unie de France, qui réunit luthériens et réformés, a dénoncé les "postures identitaires", appelant au "partage" devant le ministre de l'Intérieur et des Cultes, Manuel Valls.
"Il s'agit pour notre protestantisme (...) de passer de la connivence au partage, de l'entre-soi à la rencontre, d'une Église qui se serre les coudes à une Église qui ouvre les bras", a déclaré M. Schlumberger lors de son premier discours en tant que président de la nouvelle Église protestante unie de France.
Pendant ce service inaugural, en présence de nombreux croyants et de représentants de plusieurs confessions religieuses dont l'archevêque de Lyon, Philippe Barbarin, le pasteur s'est élevé contre "les postures identitaires", notamment "sociales".
"Elles procèdent de la peur et de l'illusion, la peur de l'autre et l'illusion que l'on pourrait exister sans lui, voire contre lui", a-t-il dit.
"On peut bien sûr comprendre les racines de ces peurs et de ces illusions, des racines parfois bien réelles, et si souvent entretenues et instrumentalisées. Mais on ne saurait se résigner ni à les laisser se répandre, ni à simplement se désoler de leurs effets néfastes", a poursuivi ce pasteur depuis 30 ans de l'Église réformée.
"Nous avons besoin les uns des autres. Notre société, rongée par la défiance, a besoin de cette hospitalité fondamentale", a-t-il ajouté, évoquant le fait que les personnes agnostiques et athées sont désormais majoritaires en France.
Un monde où les institutions religieuses sont "désormais marginales"
Il a par ailleurs justifié la fusion de l'Église réformée et de l'Église évangélique luthérienne de France dans un monde où "les institutions religieuses sont désormais marginales, les convictions sont individualisées" et les "affiliations fluctuantes".
"Le protestantisme français ne peut donc plus exister en s'appuyant contre un autre culte (la religion catholique, NDLR). Il ne faut pas s'en désoler. C'est sans doute la chance de trouver une nouvelle manière d'être Église, pertinente dans ce monde-ci. C'est notre grand défi", a-t-il encore estimé.
A l'issue de ce discours, fidèles et visiteurs ont reçu des graines de fleurs et une bougie, qu'ils étaient invités à allumer dans le Grand Temple, "en signe de communion".
"Je veux renouveler un message de sympathie et de confiance à l'endroit des protestants de France et les assurer combien ils peuvent vivre pleinement, intensément leur foi chrétienne", a ensuite déclaré le ministre des Cultes, Manuel Valls, saluant "l'esprit de responsabilité et la capacité d'écoute attentive et de dialogue" du pasteur Schlumberger.
"Aujourd'hui, vous optez pour une Église unie, mais pas uniforme, car le protestantisme, c'est le pluralisme", a estimé le ministre.
Par ailleurs, il a réaffirmé l'importance de la laïcité dans la République française, que les protestants ont "toujours défendue", selon lui.
"Le message historique du protestantisme, c'est justement celui de la tolérance, de l'ouverture, de la libération de l'individu, de son accès à la connaissance par lui-même. Comment ne pas voir autant de points communs avec les valeurs de la République ? C'est donc bien que leurs destins sont liés", a-t-il poursuivi.
"La laïcité est notre rempart contre tous ceux qui veulent mettre sur la scène publique l'intolérance, l'exclusion, le refus du débat, l'obscurantisme, qui n'ont pas leur place dans la République", a souligné le ministre.
Sur 1,7 million de protestants français (3% de la population), environ 800.000 sont affiliés à la Fédération protestante de France (FPF), regroupant plus de 1.400 paroisses. La nouvelle Église protestante Unie en compte environ 450, avec 400.000 personnes faisant appel à ses services.