La 30e réunion de l'Union des organisations islamiques de France (UOIF), qui attire chaque année plus de 100.000 visiteurs au Bourget, près de Paris, s'est ouverte vendredi dans un climat d'inquiétude, née de nouvelles polémiques sur le voile.
"Il y a un vrai sentiment d'inquiétude parmi nous", a déclaré à l'AFP, le président de l'UOIF, Ahmed Jaballah. "Les dernières déclarations sur la laïcité nous montrent qu'il y a une dérive qui va loin", a-t-il ajouté.
Le rassemblement, qui se tient jusqu'à lundi, est inhabituellement entouré d'une publicité discrète. L'année dernière, les autorités avaient pris une décision qui avait fait grand bruit, en interdisant la venue de six invités accusés de radicalisme, dont l'influent théologien Youssef al-Qaradaoui. Depuis, ce théologien, d'origine égyptienne et établi au Qatar, a perdu de son prestige auprès d'une partie de ses coreligionnaires en raison de ses prises de position controversées sur le "printemps arabe".
Parmi les conférenciers attendus cette année figurent notamment l'intellectuel suisse Tariq Ramadan et son frère Hani Ramadan, qui évoqueront respectivement la question de l'islam traité par les médias, ou "la miséricorde en islam".
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Tariq et Hani Ramadan sont les petits-fils de Hassan al Banna, qui avait fondé en 1928 la confrérie des Frères musulmans, responsable d'attentats sanglants dans les années 1940.
La réunion de l'UOIF intervient au moment où le port du voile musulman fait de nouveau polémique, au point qu'une évolution de la loi sur la laïcité est souhaitée, y compris par le président François Hollande.
La question de la laïcité, brandie en étendard pendant la campagne présidentielle en 2012, a refait surface, avec l'annulation par la Cour de cassation du licenciement par la crèche privée Baby-Loup de Chanteloup-les-Vignes (Yvelines) d'une jeune femme qui avait porté un foulard, en dépit du règlement intérieur.
Cette décision a donné lieu à une controverse, certains estimant que l'interdiction du foulard dans les entreprises publiques devait être étendue aux entreprises privées, d'autres jugeant qu'une telle mesure serait contraire à la loi de 1905, sur la séparation des Eglises et de l'Etat.
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"Les dernières déclarations de ceux qui veulent étendre la loi de la laïcité dans les établissements privés suscitent une vraie inquiétude chez les musulmans: on est en train de revoir une laïcité à la mesure de leur pratique", a estimé M. Jaballah. "Au moment où on autorise la loi sur le mariage homosexuel, on émet des propositions de loi restrictives concernant les musulmans, qui ne me paraissent pas constituer des éléments d'égalité", a-t-il considéré.
Le rassemblement de l'UOIF est la plus importante rencontre de ce type en France, attirant plus de 100.000 visiteurs chaque année au Parc des Expositions du Bourget. L'UOIF, proche des Frères musulmans, est la deuxième fédération de l'islam de France et regroupe plus de 200 associations et 450 salles de prière.
La 29e édition, l'an dernier, avait été marquée par de fortes tensions, après que le président Nicolas Sarkozy eut mis en garde l'UOIF contre "les porteurs d'appels à la violence, à la haine et à l'antisémitisme".
Outre six invités déclarés persona non grata, une trentaine d'islamistes radicaux présumés avaient été arrêtés et six autres expulsés après les attentats meurtriers de Toulouse et Montauban, perpétrés par Mohamed Merah, le "tueur au scooter", qui avait fait sept victimes, trois militaires et quatre juifs dont trois enfants.