Un juge d'instruction rennais va enquêter sur des "imprudences" qui seraient à l'origine de la noyade d'un élève-officier de la prestigieuse école militaire de Saint-Cyr Coëtquidan (Morbihan) qui forme les cadres de l'armée française.
Le parquet de Rennes, compétent en matière militaire, a ouvert une instruction pour "homicide involontaire" car "les investigations complémentaires ont permis de confirmer que ce décès était intervenu à la suite d'imprudences", a indiqué le procureur de la République de Rennes, Thierry Pocquet du Haut-Jussé dans un communiqué, sans donner davantage de précisions.
La section de recherches de la gendarmerie de Rennes avait été chargée début novembre d'une enquête complémentaire sur les circonstances de la mort du sous-lieutenant Jallal Hami, âgé de 24 ans, lors de la traversée d'un étang de 50 mètres dans la prestigieuse école basée en Bretagne, durant une épreuve réservée aux recrues.
Celle-ci s'était déroulée dans la nuit du 29 au 30 octobre lors d'une soirée "de transmission des valeurs et des traditions de l'école", validée par les autorités militaires mais apparentée à du bizutage par une association de défense des militaires.
"L'instruction permettra notamment de rechercher le cadre précis dans lequel ce type d'activité s'inscrit, et la répartition des rôles dans les décisions qui ont abouti à l'organisation de l'activité au cours de laquelle la victime s'est noyée", a précisé le procureur dans son communiqué.
"Zone d'ombre"
"Ce n'est qu'à l'issue de ces recherches et analyses que pourront être appréciées les conditions d'éventuelles mises en examen", a-t-il ajouté.
Me Marie-Laure Ingouf, l'avocate de la famille de Jallal Hami, a estimé que "dans l'absolu on ne peut que se réjouir" de la décision du parquet de Rennes, qui va lui permettre "d'avoir accès au dossier et de faire des demandes d'actes". Toutefois, la procédure "va rallonger considérablement les délais de procédures", a-t-elle regretté, jointe au téléphone par l'AFP vendredi soir.
La famille de la victime, originaire de Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), avait dénoncé au lendemain du drame "des zones d'ombre" autour du décès.
"Notre intime conviction, c'est qu'il y a eu un vrai manquement aux règles de sécurité et de prudence", avait alors indiqué Me Ingouf, affirmant que les camarades du jeune homme avaient mis près d'une heure avant de s'apercevoir de sa disparition.
Le parquet de Vannes, initialement en charge du dossier, avait pointé du doigt l'encadrement de l'école militaire, indiquant qu'il n'y avait aucun cadre de l'école sur la zone de l'épreuve, qui s'est déroulée sous la supervision d'une dizaine d'étudiants de deuxième année alors que "cela présentait un certain risque".
Jallal Hami, entré directement à Saint-Cyr en troisième année grâce à son brillant cursus universitaire, participait à cette soirée aux côtés d'étudiants de première année.
L'école de Saint-Cyr Coëtquidan avait déjà été endeuillée en 2004 après la mort de deux élèves-officiers lors d'un exercice en montagne. En 2007, deux officiers du Centre d'instruction et d'entraînement au combat en montagne (CIECM) qui encadraient ces élèves avaient été condamnés à des peines de prison avec sursis pour avoir involontairement causé leur mort.