Philippe Courroye, ex-procureur de Nanterre, a été "installé" vendredi au parquet général de Paris, par écrit et en son absence, une semaine après la publication de sa nomination forcée au Journal Officiel, a-t-on appris samedi auprès de ses avocats.
"On a fait ça à toute vitesse et en pleine clandestinité", a regretté auprès de l'AFP Me Jean-Yves Dupeux, confirmant une information du journal Le Monde. "Aucun autre magistrat n'est traité comme ça en France".
Le très controversé procureur est actuellement en vacances et avait prévu de rentrer à Nanterre après le 15 août.
Il avait annoncé le 20 juillet, par le biais de ses avocats, que la Chancellerie proposait de le muter contre son gré au poste d'avocat général à Paris. Le Conseil supérieur de la magistrature (CSM) avait donné le 31 juillet son feu vert à cette proposition, et le décret de nomination avait été signé le 2 août et publié le lendemain au Journal Officiel.
M. Courroye avait pour sa part fait savoir qu'il avait demandé une mise en disponibilité afin de devenir avocat à Paris.
Il a également engagé un recours devant le Conseil d'Etat contre sa nomination. Le "référé-suspension" (procédure d'urgence) doit être examiné le 6 septembre par la haute juridiction administrative, l'examen au fond ne devant pas intervenir avant plusieurs mois.
"Le référé-suspension est maintenu et a encore tout son objet", a assuré à l'AFP l'avocate de M. Courroye au Conseil d'Etat, Me Claire Waquet.
Mais, du fait de son installation accélérée, sa demande de mise en disponibilité pour exercer comme avocat à Paris devient "sans objet", a regretté Me Dupeux.
Les magistrats ou anciens magistrats ne peuvent en effet exercer la profession d'avocat dans la même juridiction avant un délai de cinq ans, selon l'ordonnance de 1958 sur le statut des magistrats.
"On lui fait boire la coupe jusqu'à la lie en lui fermant la porte à la nouvelle carrière qu'il voulait construire", a regretté Alexandra Onfray, présidente du tout nouveau syndicat classé à droite MPJ (Magistrats pour la Justice). Selon elle, il faut par ailleurs "relativiser les chances de succès" du référé-suspension devant le Conseil d'Etat, car "la conception de l'urgence en matière administrative est assez étroite".