Les journalistes Edith Bouvier et William Daniels, évacués jeudi de la ville syrienne de Homs, sont rentrés vendredi soir en France, où ils ont été accueillis par Nicolas Sarkozy qui a promis que Damas devra "rendre des comptes" pour ses "crimes".
"Je voudrais dire de la façon la plus solennelle que les autorités syriennes auront à rendre des comptes devant les juridictions pénales internationales de leurs crimes", a déclaré le chef de l'Etat lors d'une brève allocution à l'aéroport militaire de Villacoublay (Yvelines).
Avant d'aller s'entretenir avec eux, en compagnie des proches, dans l'avion, il a loué le "courage" d'Edith Bouvier, 31 ans, qui souffre d'une double fracture du fémur, et souligné l'esprit "chevaleresque" de William Daniels, 34 ans, "qui n'a jamais abandonné" la journaliste du Figaro "alors qu'il était valide".
Il a également rendu hommage au grand reporter de France 2 Gilles Jacquier, tué en Syrie à 43 ans en janvier, et au photographe Rémi Ochlik, 28 ans, mort dans le bombardement dans lequel Edith Bouvier a été blessée, le 22 février, dans un quartier de Homs (centre de la Syrie) alors tenu par les rebelles.
Tandis que William Daniels, bonnet noir, jeans et blouson militaire, brandissait le poing vers ses confrères qui suivaient la scène des retrouvailles à distance, Edith Bouvier était descendue de l'appareil sur un brancard avant d'être évacuée en ambulance vers l'hôpital militaire Percy de Clamart, en région parisienne.
William Daniels a rendu hommage aux habitants de Homs qui les ont protégés et d'où ils ont été évacués jeudi, "des héros qui se font massacrer" et qui les ont traités "comme des rois" durant "neuf jours de cauchemar".
Dans un récit recueilli par Le Figaro de samedi, les deux journalistes rendent un nouvel hommage aux rebelles qui les ont exfiltrés vers le Liban et racontent les neuf jours passés sous les bombardements à Homs. Ils disent leur sentiment d'avoir été "directement visés" par les bombardements syriens du 22 février.
Juste avant leur retour en France, le parquet de Paris a diligenté une enquête préliminaire, pour le "meurtre" de Rémi Ochlik et pour "tentative de meurtre" d'Edith Bouvier, lors de ce bombardement, qui a également coûté la vie à la journaliste américaine Marie Colvin.
L'un des premiers objectifs de cette enquête sera d'identifier formellement le corps de Rémi Ochlik, que le Comité International de la Croix Rouge (CICR) acheminait vendredi vers Damas, d'où sa dépouille doit être rapatriée. Le quartier de Baba Amr où il a été tué était devenu le bastion des rebelles syriens avant de tomber aux mains de l'armée gouvernementale syrienne jeudi.
Pilonné sans relâche par le régime pendant plus de 25 jours, il a été pris après ce que l'Armée syrienne libre (ASL), composée d'opposants et de soldats qui ont déserté l'armée régulière, a présenté comme un "repli tactique".
Edith Bouvier, qui travaillait pour Le Figaro, et William Daniels, un photographe freelance qui avait décidé de rester à ses côtés, avaient échoué dans une première tentative de quitter Homs avec le photographe britannique Paul Conroy, lui aussi blessé le 22 février. Lors de l'opération organisée le 28 février par les rebelles syriens aidés d'activistes de l'organisation Avaaz, Paul Conroy était parvenu à s'échapper et à gagner le Liban voisin, distant d'une trentaine de kilomètres.
Mais plusieurs membres de son escorte avaient trouvé la mort dans un bombardement de l'armée syrienne. Edith Bouvier et Williams Daniels avaient été contraints de rebrousser chemin et de retourner dans la ville assiégée.
Une autre tentative menée par l'ASL a été couronnée de succès jeudi malgré le fait que les troupes du régime entraient au même moment dans Baba Amr, et que l'ASL a déploré des morts dans ses rangs au cours de cette évacuation.
Les deux journalistes sont arrivés au Liban jeudi dans la soirée, leur voyage jusqu'à Beyrouth étant encore perturbé par les abondantes chutes de neige sur les montagnes libanaises. A Moscou, le Premier ministre russe Vladimir Poutine a assuré que son pays avait tenté d'évacuer Edith Bouvier mais que l'opération avait échoué car la journaliste était bloquée par des "insurgés".
Un autre journaliste coincé à Homs, l'Espagnol Javier Espinosa, avait gagné le Liban mercredi.