André-Pierre Gignac, c'est une histoire de détours et de retours : place de titulaire perdue et reconquise, des stades qui chambrent puis adulent, et un exil mexicain aux allures de pré-retraite qui lui vaut finalement d'être appelé en équipe de France pour l'Euro 2016.
«Je viens, je pars, je reviens...» En équipe de France comme dans sa carrière, inaugurée par un triplé de haute volée le 26 août 2006 pour sa première titularisation en Ligue 1 sous le maillot de Lorient, le joueur de 30 ans, natif de Martigues, a toujours été un adepte des trajectoires sinusoïdales.
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Ce grand affectif est aujourd'hui adulé au Mexique où, en plus d'être meilleur buteur du championnat, il se montre disponible et affable pour les supporters de son club des Tigres de Monterrey. Avant ça, il fut presque autant hué qu'acclamé. A son arrivée à Toulouse lors de l'été 2007, il perd progressivement sa place de titulaire au terme d'une saison loupée (2 buts en 28 matchs), avant de flamber l'année suivante, marquant 24 fois. A Marseille, il débutera plutôt bien, avant de devenir la tête de Turc du Vélodrome l'année suivante.
«Ça n'avait pas très bien commencé entre vous et moi», avait d'ailleurs lancé «Dédé» à un Vélodrome reconquis, à l'issue de son dernier match à l'OM.
«Un Big Mac pour Gignac»
Susceptible, il avait en effet répondu sur le terrain aux moqueries de l'exigeant public marseillais. Lors de ses trois dernières saisons à l'OM, il a toujours inscrit au moins 13 buts, et même 21 sous la houlette de Marcelo Bielsa. Sous le régime "El Loco", il n'avait d'ailleurs jamais été aussi affûté, alors que les fans parisiens l'avait chambré, scandant «un Big Mac pour Gignac» quand sa silhouette s'était arrondie les saisons précédentes.
Aussi adroit dans le jeu de tête que dans la répartie, imperméable aux enquêtes judiciaires sur son transfert de Toulouse à Marseille, loué pour sa puissance de frappe autant que pour sa «grinta», APG fait désormais le bonheur du championnat mexicain. Il en est la superstar, à la suite d'un choix de carrière qui a pu sembler déroutant à première vue, avant de se métamorphoser en indéniable succès, puisque le voilà propulsé attaquant N.2 des Bleus pour l'Euro en France.
«Dans ma tête, je ne faisais pas une croix (sur les Bleus), mais il y avait 95% de chance de ne pas être rappelé», exposait-il en novembre, alors que Didier Deschamps l'avait rappelé in extremis pour pallier de nombreuses absences. «C'était même une cote à 100 contre 1. Le championnat mexicain est méconnu, je partais de très, très loin.»
Prêt pour un retour au Vélodrome
Bien sûr, l'affaire de la sex-tape qui a abouti à la non-sélection de Karim Benzema, et les blessures de Nabil Fekir et Paul-Georges Ntep, sont les explications les plus évidentes à cet énième retournement de situation. «Ce stage tient à des circonstances favorables», était-il d'ailleurs le premier à reconnaître, «mais si en mars je reviens ce sera une bonne nouvelle.»
En mars, il était toujours là. Mais c'est aussi parce qu'il a démontré à Deschamps qu'il n'avait rien perdu de ses qualités offensives au pays des Aztèques: buteur face à l'Allemagne, le 13 novembre, le soir des attentats de Paris, il s'était montré à son avantage. Et face à la Russie au Stade de France, il avait récidivé pour inscrire son 7e but en 25 sélections.
Le voilà prêt pour un retour en majesté au Vélodrome, où les Bleus reçoivent l'Albanie le 15 juin en phase de groupe. Et comme il n'a encore jamais marqué de but en tournoi international, les adversaires des Bleus devraient se méfier d'un nouveau retournement de courbe...