Le parquet de Bobigny a annoncé vendredi l'ouverture d'une information judiciaire sur les circonstances de la mort, le 5 janvier, d'un homme de 30 ans ayant reçu une douzaine de décharges de pistolet à impulsion électrique lors de son interpellation par la police à Montfermeil (Seine-Saint-Denis).
Le parquet de Bobigny annonce, ce vendredi 12 janvier, l'ouverture d'une information judiciaire après la mort d'un homme lors de son interpellation à Montfermeil la semaine dernière.
Les chefs retenus sont «violences ayant entraîné la mort sans intention de la donner par personne dépositaire de l’autorité publique dans l’exercice de ses fonctions».
«Les investigations s'attacheront à rechercher si un lien de causalité peut être établi entre les usages répétés de pistolet à impulsion électrique, les moyens qui ont été utilisés pour l'interpellation et le décès intervenu», a indiqué le procureur de la République de Bobigny, Eric Mathais, dans un communiqué.
«La multiplicité des policiers intervenants et le comportement de l'homme décédé rendent complexes l'établissement de la chronologie exacte et la détermination de la légitimité des moyens employés», a ajouté le parquet.
Un individu «virulent, agressif et menaçant»
L'homme de 30 ans avait été interpellé pour la dégradation d'une épicerie à Montfermeil, après le signalement auprès de la police du gérant du magasin. Sur place, l'homme était seul dans l'épicerie, consommant de l'alcool.
D'après ses collègues, il était devenu violent depuis quelques jours. Les forces de l'ordre avaient dû intervenir pour des violences de sa part avec une arme blanche.
Dépeint comme un individu «virulent, agressif et menaçant» qui ne semblait pas être dans un état psychologique normal, les policiers sont d'abord intervenus dans la rue pour tenter de le maîtriser, selon une source policière à CNEWS.
Les tentatives des collègues et de la mère de l'homme ont également été infructueuses face à sa virulence. À noter que dans l'après-midi, il avait contacté sa mère en lui disant «je ne suis pas bien, on est rentrés dans ma tête».
«Il était surexcité, il hurlait. Il est connu de la police pour sa violence et s’était d’ailleurs baladé avec une machette quelques jours plus tôt dans le secteur» a ajouté cette source policière.
Lorsque les policiers se sont approchés de lui, il a tendu le bras. Craignant qu'il saisisse leur arme de service, ils ont fait usage du pistolet à impulsion électrique, sans toutefois réussir à le menotter.
La situation a dégénéré, l'un des policiers s'est fait violemment mordre au doigt et a été frappé d'un coup de pied au visage. Ils ont alors fait appel à du renfort, d'après cette même source policière.
Selon le parquet, six fonctionnaires, sur les 18 qui intervenaient, ont fait usage de leur pistolet à impulsion électrique (PIE, qui projette des aiguillons reliés à l'arme par des filins). C'est à la fin de l'intervention que l'homme de 30 ans a fait deux arrêts cardio-respiratoires avant de tomber dans le coma, après 12 décharges reçues.
Deux enquêtes ouvertes
L'enquête sur l'intervention des policiers a été confiée à l'Inspection générale de la police nationale (IGPN). D'après le parquet, les policiers n'ont pas encore été auditionnés et l'examen de la vidéosurveillance est en cours. Une seconde enquête, qui visait l'homme sur les violences et menaces de mort à l'encontre des fonctionnaires, avait été confiée à la Sûreté territoriale de la Seine-Saint-Denis.
Dans son rapport annuel publié en septembre, l'IGPN notait qu'«aucune personne décédée ou blessée au sens du recensement des personnes blessées et décédées à l'occasion d'une intervention de police et en lien avec l'utilisation du PIE n'a été dénombrée» en 2022.
«Avec 2.995 usages opérationnels recensés en 2022, le recours à cette arme est en hausse de 11% par rapport à l'année précédente», précisait le rapport, relevant une augmentation constante de son usage ces cinq dernières années, à l'exception de 2020.
Cette hausse est à mettre en lien avec le nombre de pistolets à impulsion électrique disponibles. Entre 2014 et fin janvier 2023, le nombre de PIE en dotation a été multiplié par vingt, d'après l'IGPN.
L'usage de cette arme non-létale est critiqué par des associations de défense des droits humains comme Amnesty International, mettant en avant des cas anciens de décès liés à l'usage du PIE.
D'après une source policière, le nouveau modèle dont les effectifs de police nationale sont progressivement équipés, le T7 de la société Axon (anciennement Taser), permet des décharges plus intenses.