Le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, a annoncé qu’il fallait «préparer la France» à «une évolution des températures de +4°C». Le ministre a dévoilé la stratégie de la France pour faire face aux conséquences majeures du réchauffement climatique.
Un réchauffement climatique inévitable. Alors que le dernier rapport du Giec a estimé en mars que le réchauffement climatique atteindrait la barre des +1,5°C au niveau mondial dès 2030-2035, le ministre de la Transition écologique a déclaré qu’il fallait préparer la France à «une évolution de température de 4°C», ce qui correspond à la prévision «pessimiste» des experts pour 2100. Il a également dévoilé sa stratégie pour y faire face.
L’année 2022, la plus chaude jamais enregistrée en France depuis 1900, avec l'été le plus chaud jamais enregistré en Europe, ainsi que les événements extrêmes dans le monde (sécheresse en Espagne et en Afrique, canicules en Asie, ouragan en Birmanie...), ont marqué les esprits. Mais, certains, à l’image de Christophe Béchu, redoutent qu’il ne s’agisse que d’un avant-goût de la France de 2100, avec des conséquences concrètes sur le territoire, et une stratégie à mettre en place au plus tôt pour anticiper et s’adapter à cette nouvelle réalité.
Un scénario «pessimiste» à +4°C en France en 2100
«La réalité globale du réchauffement climatique s'impose, il faut donc se préparer concrètement à ses effets inévitables sur notre territoire et sur nos vies», a expliqué ce dimanche Christophe Béchu dans le JDD. «C'est pourquoi nous voulons doter notre pays d'une trajectoire claire en termes d'adaptation» afin de «construire un modèle de résilience au plus près des réalités du terrain et d'éviter la mal-adaptation», a-t-il précisé.
Car la réalité est la suivante : d'après ce que confirment les derniers travaux des experts du Giec, si tous les Etats du monde n’accentuent pas leurs efforts pour diminuer encore leurs émissions, on se dirige vers un réchauffement climatique entre +2,8°C et +3,2°C en 2100 en moyenne au niveau mondial, ce qui correspond à +4°C pour la France car l’Europe se réchauffe plus vite. Le gouvernement veut donc désormais prévoir ce «scénario plus pessimiste» correspondant «à la tendance probable en l'absence de mesures additionnelles».
Des conséquences majeures sur le territoire français
Dans ce scénario, les canicules pourraient durer jusqu'à deux mois et certaines zones particulièrement exposées (arc méditerranéen, couloir rhodanien, vallée de la Garonne) pourraient connaître jusqu'à 90 nuits tropicales par an. Le gouvernement s'attend aussi à des pluies extrêmes plus intenses, notamment sur une large moitié nord, et des épisodes de sécheresse de plus d'un mois l'été dans le sud et l'ouest. Les pénuries d’eau se multiplieront avec de «fortes tensions sur l'agriculture et la forêt» et la «quasi-totalité des glaciers français auront disparu».
La multiplication des inondations aura un «fort impact» sur les assurances, sur l'aménagement du territoire et sur les transports. Enfin, des «risques importants sur tous les bâtiments, les infrastructures de transport et les réseaux d’énergie, d’eau et de télécommunications» sont à prévoir avec des «effets marqués sur les zones côtières comme l'érosion du trait de côte, ou les submersions marines», rappelle Christophe Béchu.
«A +2°C, le risque de sécheresse est multiplié par deux par rapport à 1990 ; à +4°C, le risque est multiplié par cinq. Aujourd’hui, on constate 9% de perte d’enneigement ; à +4°C, c’est 25% de perte d’enneigement et la disparition des glaciers français. Il y a aussi des conséquences en matière de fréquence des cyclones, de montée des eaux, etc.», précise le ministre.
«S'adapter à ça, c'est sortir du déni», a-t-il jugé. «Il faut qu'on investisse dans des matériaux qui nous permettent de résister à ces températures, ça veut dire penser l'organisation des services publics, les lois sur l'eau, la protection de la biodiversité, des sols, des règles sur les assurances...».
AU moins 2,3 milliards d'euros additionnels par an
Face à cela, le gouvernement français, en plus des mesures déjà effectives (plan Eau, Fonds vert...), propose donc trois chantiers. Le premier visera à mettre à jour les différents référentiels (Drias, Drias Eau, Climadiag) sur lesquels s'appuient les autorités pour anticiper les effets du réchauffement. Le deuxième sera un plan d'accompagnement des collectivités locales tandis que le troisième lancera des études de vulnérabilité pour adapter l'activité économique.
«Les mesures d'adaptation à mettre en place dès aujourd'hui, quelle que soit la trajectoire d'adaptation fixée, représentent au minimum 2,3 milliards d'euros additionnels par an», prévient déjà le gouvernement.
«Si on se prépare à une France à +4°C et qu’à la fin on a un réchauffement climatique qui n’est que de +2°C, c’est moins grave que si on se prépare à une France à +2°C et qu’on finit à une France à +4°C. On a qualifié le premier scénario d’optimiste et le second de pessimiste, mais en réalité c’est plutôt de scénario réaliste qu’il faut parler», conclut le ministre.