Le périphérique parisien fête jeudi ses quarante ans mais ses quelque 100.000 riverains ne sont pas à la fête: pour eux, le "périph", c'est avant tout du bruit et de la poussière.
"Il y a trop de poussière: on la retrouve partout: sur les meubles, au sol... Pratiquement tous les jours, il faut passer l'aspirateur ou un coup d'éponge", décrit Pascal Okitadjanga, 48 ans.
Comme lui, des dizaines de milliers de Parisiens et de banlieusards vivent à proximité de cette autoroute urbaine de 35 km qui voit défiler jusqu'à 270.000 voitures chaque jour.
De chaque côté de cette frontière entre Paris et la banlieue, des centaines d'immeubles de logements se toisent, à quelques mètres du flot ininterrompu de véhicules.
Cent mille riverains, l'équivalent d'une ville comme Nancy, sont exposés aux nuisances.
"Près du périphérique, c'est là où on a les niveaux les plus importants de dioxyde d'azote", relève Arthur de Pas, ingénieur communication à Airparif.
Le niveau de particules produites notamment par les véhicules diesel dépasse lui aussi les normes autorisées.
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Les tours d'immeubles côtoyant des écoles, des maisons de retraite et des équipements sportifs, "ça pose des questions en termes de santé par rapport aux personnes sensibles", souligne Arthur De Pas.
Selon une étude de l'observatoire régional de santé d'Ile-de-France, la proximité des axes à fort trafic routier est responsable de 16% des nouveaux cas d'asthme chez les enfants. La pollution provoque aussi des hospitalisations pour causes cardiorespiratoires et des décès anticipés.
La situation est telle que la France est poursuivie par la Commission européenne devant la Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) pour ses mauvais résultats en termes de pollution aux particules fines.
"Toujours du bruit"
Les voisins du périphérique subissent aussi son ronronnement omniprésent.
"On a des fenêtres à double vitrage, mais ça ne suffit pas, il y a toujours du bruit", se plaint Fatha Benabdellah, dont les fenêtres donnant sur l'axe routier restent toujours fermées.
"60.000 personnes sont touchées par le bruit du périphérique, dont 40.000 sont en situation de dépassement des valeurs limites", explique Fanny Mietlicki, directrice de Bruitparif. Le pire moment: de 05h00 à 07h00, juste avant l'heure de pointe, lorsque les autos roulent à vive allure aux côtés de véhicules utilitaires et de poids lourds, plus nombreux à cette heure.
A certains endroits, pour les riverains, "c'est comme si on passait l'aspirateur sur le balcon en continu", décrit Fanny Mietlicki. Un bruit de fond auquel s'ajoutent des bruits intempestifs: sirènes, motos pétaradantes, klaxons.
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Pour leur tranquillité, Bruitparif préconise de réduire la vitesse autorisée, en ne dépassant pas 50 km/h la nuit.
La mairie de Paris a pour l'instant pour objectif d'abaisser la vitesse à 70 km/h, contre 80 actuellement. "Cela a un impact positif en termes de sécurité routière, de lutte contre la pollution et contre les nuisances sonores", explique Julien Bargeton, adjoint PS au maire de Paris chargé des transports. "C'est une décision qui dépend du gouvernement, on attend la réponse", précise-t-il.
A deux endroits, Porte des Lilas et Porte de Vanves, le périphérique a été couvert, augmentant sensiblement la qualité de vie du quartier.
"On envisage de faire d'autres couvertures, mais ce sont des ouvrages très coûteux", qui se chiffrent en centaines de millions d'euros, commente M. Bargeton.
Un revêtement anti-bruit est également testé Porte de Vincennes, qui a permis d'abaisser le niveau sonore de quelques décibels.
L'adjoint EELV à l'environnement René Dutrey rêve lui "à moyen terme de remplacer le périphérique par un boulevard classique, avec des feux rouges", une circulation en baisse et des véhicules diesel moins nombreux.
Un argument pourrait convaincre les automobilistes de lever le pied: dans leurs voitures, ce sont eux qui sont les plus exposés à la pollution.