Où sont-ils ? Comment se déplacent-ils ? Comment se transforment-ils ? Les quelque 290 milliards de microdéchets flottants en Méditerranée vont faire l'objet, à partir de cet été, d'une campagne de cartographie.
Comparée aux "soupes de plastiques" dans l'Atlantique et le Pacifique, celle de la "grande bleue" présenterait une concentration moyenne supérieure par km2 selon les extrapolations scientifiques des deux premières missions Méditerranée en danger en 2010 et 2011.
Le 28 juillet, la nouvelle campagne MED entamera ses relevés en mer pour "constituer une carte exhaustive du microplastique flottant en Méditerranée à l'horizon 2014", explique à l'AFP Bruno Dumontet, le chef de l'expédition.
Pour mener à bien le projet, un appel à participation a été lancé. "En trois jours on était complet", se réjouit M. Dumontet. Des étudiants, des ingénieurs, des commerciaux, des scientifiques et même un agriculteur à la retraite de 85 ans qui adore faire les quarts de nuit ont répondu présent.
Pour chacune des trois campagnes d'une semaine (fin juillet et première quinzaine d'août) sur un voilier de 17 m les organisateurs choisissent 5 éco-volontaires, qui versent chacun 750 euros de participation.
La situation est "dramatique par endroits"
Sous la coordination de l'Observatoire océanologique de Villefranche-sur-Mer, les chercheurs, secondés par les éco-volontaires, procèderont à des prélèvements selon un quadrillage précis en Mer Liguro-provençale.
"On aura alors le nombre de particules relevées dans chaque carré à un moment T et avec les analyses satellites définissant les courants de surface on pourra faire des études sur la manière dont se distribue tout ce plastique et l'évolution que cela peut donner dans le temps", souligne M. Dumontet.
Une carte précise devrait aider "les collectivités locales sur la gestion des déchets", note le chercheur.
"Maintenant, il s'agit de savoir qu'est-ce qui flotte, où et d'où ça vient, à quelle cadence cela se déverse dans la mer et alors on pourra carrément établir des postes de sentinelles", renchérit Gabriel Gorsky, directeur de l'Observatoire de Villefranche.
La pollution aux plastiques apparaît particulièrement près des estuaires et des grandes agglomérations, rappelle Fabrice Bernard du Conservatoire du Littoral.
"Mais il y a aussi le jeu des courants qui les transportent, les désagrègent et ensuite ils remontent la chaîne alimentaire et, ironie de la chose, nous finissons par manger nos propres sacs plastiques", souligne M. Gorsky.
Sur la rive sud de la Méditerranée, la situation est "dramatique par endroit", témoigne Bruno Dumontet relatant un récent voyage en Algérie dans le golfe de Bejaïa. "Les pêcheurs en sont pratiquement à pêcher 50% de déchets et 50% de poissons".
MED a ainsi lancé un programme de formation dans les pays du sud pour que les chercheurs locaux prennent en main leur propre cartographie des déchets.
"Si la pollution continue au rythme actuel, la Méditerranée dans 30 ou 40 ans sera une mer quasiment morte avec un impact économique catastrophique sur toutes les populations du littoral, dont beaucoup vivent du tourisme et de la pêche", lance-t-il.