L'huile de palme, montrée du doigt par les ONG en raison de ses effets néfastes sur la santé et surtout sur l'environnement, reste quasiment toujours aussi présente dans notre alimentation malgré les tentatives des industriels de l'agroalimentaire de s'en passer.
Pas une semaine sans qu'un distributeur ne placarde sur de pleines pages de publicité sa volonté de réduire l'utilisation de l'huile de palme dans ses produits (près de 50% des produits alimentaires transformés en contiennent).
Pourtant à regarder les chiffres de près, les importations européennes de cette huile, extraite du fruit du palmier à huile, proche du palmier dattier, continuent jusqu'ici à progresser légèrement.
"Nous constatons en France et en Europe depuis deux ans une stagnation de la consommation mais celle-ci ne fléchit pas", explique Boris Patentreger, chargé de programme forêt pour l'organisation World Wildlife Fund (WWF).
"Aucun analyste sérieux ne pense que l'on peut en finir avec l'huile de palme", affirme de son côté Hubert Omont, chercheur au Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement (Cirad).
L'histoire de l'huile de palme (utilisée à 80% pour l'alimentation et 19% pour la cosmétique) est celle d'un succès fulgurant. En 30 ans, la production a été multiplié par huit et elle est devenue la première huile produite dans le monde (45 millions de tonnes en 2010) devant le soja et le colza.
Mais au début des années 2000, les ONG jettent le discrédit sur cette culture qui pousse à une déforestation sauvage et menace notamment la survie de l'orang-outang en Malaisie et en Indonésie, qui représente 85% de la production.
Cette huile est également montrée du doigt car à forte dose, elle favoriserait la survenue de maladies cardio-vasculaires.
"Pas de solution de rechange"
"Soucieux de plaire aux consommateurs, les industriels ont alors mis une pression énorme sur leurs fournisseurs pour supprimer l'huile de palme de leurs produits mais maintenant ils ont en partie fait marche arrière car souvent ils n'ont pas de solution de rechange", explique Sophie Delacharlerie, ingénieur à l'Université de Liège qui a travaillé sur ce thème avec des industriels.
Cette huile combine en effet de nombreux atouts qui explique son succès. Tout d'abord un coût de production défiant toute concurrence (le rendement à l'hectare du palmier à huile est dix fois plus élevé que celui du soja) et une grande stabilité (elle peut être stockée sous forme solide et permet de conserver les aliments).
Tout cela fait que son remplacement est complexe. "On peut repasser sur des huiles liquides mais cela ne convient pas pour tous les produits pour des raisons technologiques, on peut utiliser du beurre mais c'est plus cher, et les matières grasses hydrogénées n'ont pas non plus une bonne image auprès du public", décrypte Mme Delacharlerie.
Les groupes ont donc finalement remplacé l'huile de palme quand c'est facilement réalisable à savoir pour la plupart des produits à base de friture (chips, frites...) et pour le reste (pâte à tarte, gâteaux...) ils affirment se tourner vers l'huile de palme durable.
Une démarche qu'il faut encourager selon M. Omont.
L'Europe ne représente que 16% des importations mondiales, derrière la Chine et l'Inde, où la consommation explose, et les Etats-Unis 3% mais les pays du Nord peuvent faire pression pour une production qui respecte davantage l'environnement, explique également M. Patentreger.
Aujourd'hui, 10% de l'huile de palme produite dans le monde est certifiée durable, selon les critères de la RSPO, une organisation internationale regroupant professionnels du secteur et ONG, qui stipulent notamment que les palmiers soient plantés sur des terres non boisées, et avancent une série d'exigences sociales et environnementales.
Mais l'an passé, à peine plus de la moitié de cette production a été achetée selon WWF, qui dénonçait fin 2011 des efforts trop lents de la part des industriels.