Plusieurs pays ont ouvert des enquêtes pour blanchiment dans la foulée des révélations de l'opération "Panama papers", qui lève le voile sur un vaste système d'évasion fiscale impliquant hauts responsables politiques, sportifs ou milliardaires.
Séisme politique en Islande, lancement d'enquêtes en France, en Espagne et en Australie, indignation de la Russie, démentis en cascade : les répercussions de la divulgation par une centaine de journaux dans le monde de quelque 11,5 millions de documents provenant du cabinet d'avocats panaméen Mossack Fonseca ont été immédiates.
La justice panaméenne a annoncé lundi soir l'ouverture d'une enquête sur les "faits décrits sous l'appellation Panama papers", qui devra établir si des infractions ont été commises, par qui, et identifier les éventuels dommages financiers. Le gouvernement de ce pays, régulièrement mis en cause pour l'opacité de son système financier, avait assuré dimanche qu'il "coopérerait vigoureusement" avec la justice.
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A Moscou, la réplique a été cinglante, visant directement les Etats-Unis : l'enquête a été menée notamment par des "anciens employés du département d'Etat, de la CIA et des services secrets" et compte plein d'"inventions", a accusé un porte-parole. La "cible principale" de l'enquête, selon laquelle des proches de Vladimir Poutine auraient détourné jusqu'à 2 milliards de dollars, serait la Russie et son président dans le but de "déstabiliser" le pays, a-t-il assuré.
Le Premier ministre islandais Sigmundur David Gunnlaugsson, qui aurait créé une société dans les îles Vierges britanniques pour y cacher des millions, est aussi dans la tourmente : il a exclu de démissionner, malgré les milliers de manifestants à Reykjavik lundi soir. Une motion de censure a été déposée par l'opposition, qui sera soumise au vote à une date indéterminée.
Alors que recourir à des sociétés "offshore" n'est pas illégal en soi, plusieurs personnalités évoquées dans les "Panama papers" ont tenté de se dédouaner. En Ukraine, sans nier l'existence de comptes aux îles Vierges Britanniques, le président Petro Porochenko a ainsi assuré respecter la loi à la lettre. En Argentine, le président Mauricio Macri, cité comme directeur d'une entreprise basée aux Bahamas, a lui aussi nié toute irrégularité. Également mise en cause pour des biens immobiliers à Londres gérés via le cabinet panaméen, la famille du Premier ministre pakistanais Nawaz Sharif s'est défendue de tout acte illégal.
Procédures engagées dans plusieurs pays européens
Plusieurs gouvernements ont déjà engagé des procédures. La justice française a ouvert une enquête pour "blanchiment de fraudes fiscales aggravées", les pratiques dévoilées étant "susceptibles de concerner des résidents fiscaux français". En Espagne, la justice mais aussi le fisc ont ouvert des enquêtes, et le fisc néerlandais promet de s'intéresser aux possibles cas d'évasion fiscale. L'Australie a lancé des investigations sur 800 clients de Mossack Fonseca. Près d'une trentaine de banques allemandes, parmi lesquelles Deutsche Bank et Commerzbank, auraient eu recours aux services de Mossack Fonseca, selon le Süddeutsche Zeitung, le quotidien qui a obtenu le premier les documents cryptés, transmis par un lanceur d'alerte dont l'identité est secrète.
Plusieurs ONG anti-corruption ont appelé à l'interdiction pure et simple des sociétés écrans anonymes, à l'instar de Transparency International pour qui elles représentent "le côté obscur du système financier mondial".
A travers le monde, plus de 214.000 entités offshore sont impliquées dans les opérations financières dans plus de 200 pays et territoires selon les révélations du consortium, qui couvrent une période de près de 40 ans allant de 1977 à 2015.