Au lendemain d'un premier refus, Emmanuel Macron, dans la tourmente depuis la rentrée, a fini par accepter mardi soir la démission du ministre de l'Intérieur Gérard Collomb, qui veut reprendre la mairie de Lyon.
Depuis l'annonce le mois dernier de ses intentions pour les municipales de 2020, Gérard Collomb, qui comptait initialement rester place Beauvau jusqu'après les européennes de mai 2019, se trouvait fragilisé. Dans l'opposition comme au sein même de son ministère, de nombreuses voix se sont élevées pour réclamer son départ.
Dans l'attente de la nomination du successeur de M. Collomb, le chef de l'Etat a demandé au Premier ministre Edouard Philippe d'assurer l'intérim, selon l'Elysée. Le chef du gouvernement a annulé un voyage officiel en Afrique du Sud prévu jeudi et vendredi, a fait savoir dans la foulée Matignon.
«Le Conseil des ministres», mercredi à partir de 10h00, se déroulera «avec le gouvernement ainsi constitué», a ajouté la présidence.
Dans une interview au quotidien régional Le Progrès, le désormais ex-ministre de l'Intérieur confirmait son retour à Lyon, et évoquait même la possibilité de ne pas participer au conseil des ministres, si un successeur lui était trouvé «dans la nuit».
Dans l'après-midi, le ministre de l'Intérieur, en poste depuis mai 2017, avait déjà expliqué au Figaro qu'il «maintenait» sa «proposition de démission» faite lundi au chef de l'Etat et que ce dernier avait aussitôt refusée.
Après cette interview, Emmanuel Macron avait jugé «regrettable que Gérard Collomb se soit mis dans la situation le conduisant à devoir démissionner», selon son entourage. Le président «recevra rapidement les propositions du Premier ministre» en vue de son remplacement, avait-on précisé de même source.
Selon une source proche du dossier, l'actuel maire de la ville Georges Képénékian, qui a confirmé qu'il rendrait les clefs de Lyon à M. Collomb dans l'interview au Figaro, a envoyé sa lettre de démission au préfet du Rhône mardi soir.
Une fois entérinée, cette démission devrait entraîner la convocation, sous 15 jours, d'un conseil municipal extraordinaire pour élire le nouveau maire.
«On a un peu de temps devant nous mais tout est très clair avec Georges Képénékian. Je vais retrouver Lyon avec un immense plaisir», a confié Gérard Collomb au Progrès.
«Cirque», «grand-guignol», «mauvais vaudeville» : l'opposition ironisait sur le bras de fer engagé entre M. Collomb et le chef de l'Etat. Depuis la rentrée, l'exécutif a déjà été confronté aux démissions soudaines de Nicolas Hulot et Laura Flessel.
«On est en plein délire»
Les tensions n'ont cessé de s'intensifier entre Emmanuel Macron et son soutien de la première heure depuis l'affaire Benalla en juillet.
Gérard Collomb «a peu apprécié d'être mis en première ligne sur une affaire qu'il juge ne pas le concerner», avait expliqué son entourage.
La relation que Gérard Collomb, 71 ans, qualifiait de «filiale» avec Emmanuel Macron s'est dès lors émoussée. Début septembre le ministre a de nouveau surpris en pointant «le manque d'humilité de l'exécutif».
Mais c'est l'annonce à la mi-septembre de son départ du gouvernement programmé au printemps prochain pour être candidat à Lyon en 2020 qui a sonné le glas de sa relation avec le président. «Il a fracassé tout ce qui constituait l'imaginaire sur sa relation avec le président de la République», estimait pourtant un cadre de la Macronie.
«Le président de la République a été fâché. Mais il a serré les boulons et donc ça doit tenir», confiait récemment à l'AFP un familier du chef de l'État.
«Il va finir par ne plus me supporter. Mais si tout le monde se prosterne devant lui, il finira par s'isoler, car par nature l'Élysée isole», lâche pourtant Gérard Collomb, selon des propos tenus lors d'un déjeuner publiés dans la presse.
«On est en plein délire», «tout le monde est abasourdi», ont réagi mardi deux hauts fonctionnaires à Beauvau.
Mardi, M. Collomb n'a pas assisté aux questions au gouvernement à l'Assemblée ni au Sénat, officiellement en visite dans des services. Son entourage déclarant que le ministre «était à sa tâche».