La boutique solidaire Label Emmaüs, créée en 2016, a dénoncé ce lundi une «concurrence déloyale» de la part des géants du numérique tels qu'Amazon. En un an, les visites mensuelles du site ont baissé de 20%.
Comment concurrencer les géants du commerce en ligne ? Face à Amazon et Shein, Label Emmaüs, une boutique en ligne de seconde main, a du mal à se faire une place. Ce lundi, le site solidaire de l’association a même dénoncé la «concurrence déloyale» de ces mastodontes du numérique, notamment sur le secteur du livre.
«Créée en 2016, la marketplace solidaire souffre de plus en plus des pratiques commerciales des géants du numérique tels qu'Amazon», détaille dans un communiqué Emmaüs, qui s’en prend aussi aux chinois Shein, Temu et AliExpress.
Aujourd'hui commence la #FashionRevolutionWeek !
Donner les vêtements dont on ne sert plus ou acheter de la seconde main solidaire, c'est construire ensemble un système de mode plus juste et équitable pour les humains et la planète.
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Stratégies «délétères»
Concrètement, que dénonce l’association ? Maud Sarda, la directrice, estime que la méforme de Label Emmaüs est dûe à l’inflation et aux stratégies «délétères» des différentes plates-formes. Selon elle, la publicité «incessante», les «livraisons toujours plus rapides» et les prix tirés vers le bas ne permettent pas à l’association d’être en moyen de concurrencer les géants du numérique.
Une situation de plus en plus compliquée pour la boutique solidaire. Sur les premiers mois de 2024, les visites mensuelles ont atteint 500.000, une baisse de 20% par rapport à l’an dernier. «Depuis un an ou deux, ça commence à être vraiment compliqué de survivre», reconnaît à l’AFP la cofondatrice de Label Emmaüs, qui appelle à davantage de régulation.
Des mesures insuffisantes
Car, même si le gouvernement s’intéresse au sujet, pour le site solidaire d’Emmaüs, les mesures ne suffisent pas. Comme en mars dernier où les députés ont adopté une proposition de loi pour rendre la fast-fashion moins attractive, avec des pénalités financières et une interdiction de la publicité. Pour Maud Sarda, c’est «une belle piste» mais il faut faire plus. Elle demande notamment des lois pour «empêcher Shein de proposer 8.000 nouveaux produits par jour», ou «Amazon de proposer la livraison gratuite». Celle-ci est interdite depuis octobre 2023 sur les achats de livres neufs qui coûtent en tout moins de 35 euros.
A l’année, Label Emmaüs collecte plus de 20 millions de livres et tire un tiers de ses revenus avec leur revente. Mais l’association appelle les usagers à en faire plus et à «favoriser la circulation solidaire du livre au lieu de sa destruction». Car, selon une étude du Syndicat national de l’édition, en 2022, ce sont 14% des livres produits en France qui sont détruits au lieu d’être vendus. Comment est-ce possible ? Cette option est malheureusement moins coûteuse pour les éditeurs que le stockage. «On propose d'orienter ces invendus vers toutes les grandes associations», ajoute Maud Sarda, qui suggère de reverser une partie des ventes réalisées pour payer les droits d'auteurs.
Pour sensibiliser, l'association lance donc sur les réseaux sociaux une campagne intitulée «Tous nos livres se valent», mettant côte à côte la biographie de l’Abbé Pierre, fondateur d'Emmaüs, et celle de Jeff Bezos, PDG d'Amazon. Mais ce n’est pas la première fois que l’association s’en prend à une plate-forme de revente en ligne. L’an dernier, Emmaüs avait pointé du doigt l’application Vinted, en appelant les Français à donner leurs vêtements usagés plutôt que de gagner un peu d’argent sur Internet.