En 1992, la performance de Robin Williams au doublage du Génie dans «Aladdin» marquait durablement les esprits. Le comédien refusera toutefois d’incarner le personnage dans la suite du film en raison d’un désaccord avec Disney, dont il exigera des excuses publiques. Explications.
Une trahison intolérable. Robin Williams fut une des premières grandes stars hollywoodiennes à accepter de doubler un personnage de dessin animé quand, en 1992, il mis son talent au service de «Aladdin», un des plus grands succès de Disney. Âgé de 41 ans à l’époque, l’acteur avait profondément marqué les esprits en prêtant sa voix au Génie qui, dans la version originale, se lance dans des imitations plus folles les unes que les autres avec une énergie débordante. Des répliques que Robin Williams a enregistré pendant près de 30 heures passées en studio, où ses improvisations ne cessaient d’épater les équipes techniques.
«À chaque prise, Robin ajoutait et améliorait quelque chose, et à la 25e prise, la scène était passée d’une durée de 3 à 20 minutes. Robin n’arrêtait jamais de trouver de nouvelles idées. Et il était juste hilarant. À un moment donné, nous avons été contraints de faire sortir le responsable de l’animation, Eric Goldberg, parce qu’il n’arrivait plus à s’arrêter de rire, et cela ruinait les enregistrements. Heureusement, nous avons capté les meilleurs parties, mais plein de choses géniales n’ont pas pu être incorporées dans la version finale», assurait Ron Clements, le coréalisateur de «Aladdin» au site américain Variety, en janvier 2021.
Un an après la sortie du film au cinéma, alors qu’il assurait la promotion de «Mrs. Doubtfire», Robin Williams s’est retrouvé dans l’actualité pour une toute autre raison. Selon les rumeurs, l’acteur était en froid avec Disney, et refusait de collaborer avec le géant du divertissement à l’avenir. Pour quelle raison ? Au moment de signer son contrat pour «Aladdin», Robin Williams avait accepté un salaire très inférieur à celui initialement proposé – 75.000 dollars au lieu de 8 millions – afin de s’assurer que sa voix ne soit jamais utilisée pour vendre des produits dérivés ou tout autre forme de publicité.
«Un jour, ils sortent une publicité – une partie concernait le film, et une autre partie a été utilisée pour vendre des trucs. Non seulement ils ont utilisé ma voix, mais ils se sont servis d’un personnage que j’ai incarné et doublé pour faire leur affaire. C’était la seule chose où je leur avais dit : ‘Je ne fais pas ça’. Et c’est la seule partie qu’ils n’ont pas respectée», avait confié, dépité, le comédien. Pour lui, il fut alors hors de question de travailler à nouveau avec Disney tant qu’ils ne prononceraient pas des excuses publiques.
Des excuses publiques
Au départ, le géant du divertissement a décidé de contre-attaquer, affirmant que Robin Williams agissait par pure frustration concernant son salaire, et que toutes les opérations marketing avaient été validées par lui-même et son épouse. L’acteur, de fait, refusera de doubler le Génie dans «Aladdin : le retour de Jafar» sorti en 1994, ainsi que la série lancée dans la foulée. Son remplaçant, Dan Castellaneta – la voix américaine d’Homer Simpson – fera de son mieux pour prendre la relève. Sans toutefois réussir à égaler le génie de Robin Williams.
Selon le New York Magazine, le directeur de Disney de l’époque, Jeffrey Katzenberg, aurait tenté d’apaiser le comédien en lui offrant un Picasso estimé à plus d’un million de dollar. Sans succès. En 1994, Jeffrey Kratzenberg s’est vu refuser une promotion au sein du groupe Disney, et a décidé de quitter son poste pour lancer DreamWorks Pictures avec Steven Spielberg (et David Geffen). Il sera remplacé par Joe Roth qui offrira l’excuse publique tant attendue à Robin Williams, qui l’acceptera. Deux ans plus tard, il reprenait le rôle du Génie dans «Aladdin et le Roi des voleurs», qui marquera également la fin de la série télévisée. En 2009, le comédien a été nommé en tant que «légende de Disney» lors de la convention annuelle du géant du divertissement.
«Robin a changé la façon dont les films d'animation étaient perçus. Son talent comique exceptionnel a réussi à séduire un public adulte, ce qui était totalement nouveau. Il était également l’une des plus grandes stars à participer à un film d’animation à cette époque. Pour être clair, nous ne voulions pas de Robin parce que c’était une star. Nous le voulions parce qu'il était parfait pour le rôle. Nous le voulions parce que nous pensions que son talent pourrait apporter quelque chose de nouveau et d'innovant aux films d'animation Disney, d’une manière qui puisse être passionnante et divertissante. Et il l’a certainement fait !», ajoutait Ron Clements, le coréalisateur de «Aladdin» à Variety.