Chaque année, le livre a la cote sous le sapin. Mais encore faut-il viser juste. Pour faire plaisir à coup sûr, autant miser sur les romans qui ont reçu les grands prix littéraire de l'automne, du Goncourt au Renaudot. Un gage de qualité.
«Vivre vite», de Brigitte Giraud, prix Goncourt
©Flammarion
Le Goncourt, le plus prestigieux des prix littéraires du monde francophone, a été décerné à Brigitte Giraud, pour son roman «Vivre vite» (éd. Flammarion). Au fil de son ouvrage, l’écrivaine, 56 ans, tente de comprendre ce qui a conduit à l’accident de moto qui a coûté la vie à son mari, Claude, le 22 juin 1999 à Lyon. Il avait 41 ans. Telle une enquêtrice, la romancière lyonnaise, qui avait déjà évoqué ce tragique événement dans «A présent», revient sur l'enchaînement des causes, cette suite de décisions, de coïncidences, qui mises bout à bout, ont conduit à ce drame, qui a bouleversé sa vie.
Etait-ce le fruit du hasard, ou simplement le destin ? Pour se faire, elle convoque les «si» : et si elle n'avait pas voulu vendre l’appartement du quartier de la Croix-Rousse ? Et s’il avait plu ce jour-là… ? Rythmé par des airs de musique rock, ce roman prenant et intime, qui dresse aussi le portrait d’une époque, fait partie de ceux qui, une fois refermés, continuent de résonner en nous.
«Vivre vite», Brigitte Giraud, éd. Flammarion.
«Performance», de Simon Liberati, Prix Renaudot
©Grasset
Le prix Renaudot a quant à lui été attribué à Simon Liberati pour «Performance» (éd. Grasset). Son ouvrage raconte l’histoire d’un septuagénaire qui renoue avec le feu sacré en écrivant une mini-série sur les Rolling Stones, et qui a une relation avec Esther, une jeune femme de près de 50 ans plus jeune que lui. Une situation amoureuse que l’auteur a vécue.
«C’est relativement scandaleux, mais j’avais besoin de l’écrire. La culpabilité, la mauvaise conscience, est une chose qui m’intéresse», avait-t-il confié à Anne Fulda, sur CNEWS. Ce n’est pas la première fois que Simon Liberati est sacré. En 2009, son troisième roman, «L'hyper Justine», a obtenu le prix de Flore, puis en 2011, l’auteur et journaliste a remporté le prix Femina pour «Jayne Mansfield 1967», sur l'actrice de cabaret au destin tragique.
«Performance», Simon Liberati, éd. Grasset.
«LE MAGE DU KREMLIN», DE GIULIANO DA EMPOLI, GRAND PRIX DU ROMAN DE L'ACADÉMIE FRANÇAISE
©Gallimard
Avec «Le mage du Kremlin», l’auteur italien Giuliano da Empoli (éd. Gallimard), ancien collaborateur de Matteo Renzi, signe un roman politique hypnotique au fil duquel il dévoile les coulisses glaciales de l’ère Vladimir Poutine, de la guerre en Tchétchénie à la crise ukrainienne, en passant par les Jeux olympiques de Sotchi. Plus précisément, l’écrivain et politologue de 49 ans plonge le lecteur dans les rouages du pouvoir russe à travers l’énigmatique Vadim Baranov, un metteur en scène puis producteur d’émissions de télé-réalité, qui deviendra le conseiller du «Tsar».
On découvre l’édifiant parcours de ce personnage de l’ombre, redoutable propagandiste surnommé «Le mage du Kremlin» et librement inspiré de Vladislav Yuryevich Surkov, éminence grise du président russe pendant vingt ans. Ecrit avant l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe, le 24 février dernier, ce roman visionnaire, extrêmement documenté et instructif, nous éclaire sur la personnalité du dictateur, son ascension, ses méthodes, et offre une pertinente méditation sur la technique du pouvoir.
«Le mage du Kremlin», Giuliano da Empoli, éd. Gallimard.
«Un chien à ma table», de Claudie Hunzinger, prix Femina
©Grasset
Claudie Hunzinger a de son côté reçu le prix Femina du roman français pour son ouvrage «Un chien à ma table» (éd. Grasset). L'écrivaine de 82 ans, également artiste plasticienne, y raconte la rencontre entre un jeune couple isolé au fin fond des Vosges, et une chienne, qui sera prénommée Yes. D’où vient cette bête blessée ? Qu’a-t-elle vécu ? L’irruption de l’animal dans la vie de Sophie, romancière, amoureuse de la nature, et son compagnon Grieg, qui ne vit que le nuit, au milieu de ses livres, va bouleverser leur rapport au monde.
«Cela m'a permis de comprendre qu'on n'est pas emmuré dans notre espèce, une espèce séparée des autres espèces, différente mais pas séparée, et que faire partie des humains n'est qu'une façon très restreinte d'être au monde. Qu'on est plus vaste que ça», peut-on lire dans ce livre poétique, qui donne à réfléchir sur le couple, la vieillesse, et notre rapport à la nature.
«Un chien à ma table», Claudie Hunzinger, éd. Grasset.
«La Treizième Heure», d’Emmanuelle Bayamack-Tam, prix Médicis du roman français
©P.O.L
Autre livre à offrir, ou à s’offrir : «La Treizième Heure», paru aux éditions P.O.L, d’ Emmanuelle Bayamack-Tam. Prix Médicis du roman français, son ouvrage, inspiré par les bouleversements d’identité et de genre, est écrit du point de vue d'une adolescente, Farah, née intersexuée. Cette dernière vit en communauté au sein de La Treizième Heure, une église fondée par son père et qui est un peu spéciale, car féministe, queer, animaliste, et dans laquelle on y récite de la poésie, Nerval ou Rimbaud.
En août dernier, la romancière et professeure de français de 56 ans avait déjà reçu le Prix Landerneau des lecteurs 2022 pour ce roman. Une nouvelle récompense qu’elle a accueillie cette fois en expliquant avoir «l'impression de s'inscrire dans une lignée», citant d'anciens lauréats comme Georges Perec, Mathieu Lindon ou Marie Darrieussecq.
«La Treizième Heure», Emmanuelle Bayamack-Tam, éd. P.O.L.