Rarement un film n’avait aussi bien porté son nom. Après l’abandon de Danny Boyle à la réalisation et une sortie retardée d’un an et demi pour cause de pandémie, le 25e volet de la saga James Bond, «Mourir peut attendre», vient de sortir sur les écrans français. Et il réserve son lot de surprises qui diviseront assurément les bondophiles.
Pour sa dernière mission dans le costume de l’agent 007, Daniel Craig était attendu depuis des mois comme le messie.
Les nouvelles aventures de ce James Bond ont été mises en scène pour la première fois par l’Américain Cary Joji Fukunaga («True Detective»).
Et à peine la salle plongée dans l’obscurité, Daniel Craig fait son entrée de profil, toujours impeccable en smoking, et avance jusqu’à la cible. Entre excitation et crainte, on se demande si l’espion va réussir son ultime tir qui nous scotchera à nos fauteuils, après nous avoir fait rêvé dans «Casino Royale» en 2006 et laissé son empreinte - plus ou moins discutable - dans les trois autres volets qui ont suivi.
Un James Bond amoureux
«Mourir peut attendre» assure une continuité avec «Spectre», sorti il y a six ans. Alors que Blofeld (Christoph Waltz), à la tête de l’organisation maléfique, a cessé de sévir, James Bond, qui a rendu son matricule, profite d’une retraite bien méritée au bras de sa belle Madeleine Swann (Léa Seydoux), tentant d’oublier Vesper Lynd (Eva Green). Mais cette dolce vita sera de courte durée pour une sombre histoire de trahison, et James devra bientôt troquer son short de bain pour son légendaire Walther PPK. Son Aston Martin DB5 dotée de nombreux gadgets ressortira elle aussi du garage.
Son vieux pote de la CIA Felix Leiter se rappelle en effet à son bon souvenir et lui demande de revenir dans la course, lui le sauveur du monde qui semble le seul encore capable de récupérer une arme biologique subtilisée au MI-6, qui agit directement sur l’ADN et menace la planète. Avec au passage, le kidnapping d’un chercheur russe. Voilà donc James Bond reprenant du service auprès de M, Q et Moneypenny, toujours incarnés par Ralph Fiennes, Ben Whishaw et Naomie Harris. Un retour qui n’enchante guère le nouvel agent 007, Nomi (Lashana Lynch), qui, en parfaite représentante du mouvement MeToo, met à mal avec humour la virilité de notre espion.
Des cascades et des effets spéciaux à foison
Pendant 2 heures et 43 minutes - une durée record qui fait de «Mourir peut attendre» le plus long film de la saga et qui aurait gagné à être écourté -, Daniel Craig va traquer LE méchant de cet épisode répondant au nom de Lyutsifer Safin (ça ne s’invente pas) et interprété par Rami Malek. Malheureusement, ce personnage aurait mérité un traitement plus fouillé, étant aussi terrifiant qu'un acteur de série B. Dommage.
A l'instar de la scène d'ouverture très bondienne et d'un générique léché interprété par Billie Eilish, ce 25e volet est un divertissement de haute voltige qui nous embarque aux quatre coins de la planète - de la Norvège à l'Italie, en passant par la Jamaïque, l'Angleterre, le Japon ou Cuba -, et offre des scènes d'action parfaitement chorégraphiées dans la pure tradition de 007, à l'instar d'une folle course-poursuite dans les rues de Matera.
Les femmes s'émancipent et prennent le contrôle
James Bond, qui a pris de l'âge n'apparaît plus comme ce macho un peu lourd qui enchaîne les «vodka martini». Il a gagné en profondeur et dévoile une autre facette de sa personne, surtout dans la deuxième partie. L'espion laisse place à un homme fragile, romantique, sensible et en proie aux doutes. Pas certain que les fans valident ce choix qui reste pourtant l'une des forces de ce long-métrage. Tout comme la place des James Bond girls qui démontrent qu'elles peuvent être autre chose qu'une femme-objet. La présence en tant que scénariste de Phoebe Waller-Bridge, créatrice de la série «Killing Eve», n'y est certainement pas pour rien. Ana de Armas est désarmante en Paloma, cette jeune recrue en apparence peu entraînée mais qui dégomme ses ennemis avec une facilité déconcertante... et toujours en robe de soirée. On regrette que son apparition à l'écran ne se limite qu'à quelques minutes.
S'il renferme de nombreuses références à la saga, «Mourir peut attendre» souffre d'un scénario prévisible et se perd parfois dans des séquences trop romanesques qui nous font oublier l'essence même du personnage. Mais n'est-ce pas là le véritable enjeu de «Mourir peut attendre», faire de son héros un être qui doit vivre avec son époque ? Une chose est sûre : «James Bond reviendra», comme le promet la fin du générique. Sous quelle forme et avec quel acteur, nul ne sait... En attendant, on réserve son billet pour saluer la dernière performance de Daniel Craig, toujours brillant en Bond. James Bond.