Fort du succès de sa première édition en juin 2019, «Rockin'1000», reporté cette année en raison du Covid-19, reviendra le 17 juillet 2021 au Stade de France. Philippe Manœuvre, parrain de ce grand concert amateur, promet une édition exceptionnelle afin de prouver que le rock n'est pas mort.
Heureux de reprendre les commandes de cette deuxième édition de «Rockin’1000» ?
Ce serait difficile de ne pas l’être. C’est un spectacle fabuleux qui met en scène le son puissant de 1 000 musiciens jouant ensemble les mêmes morceaux de classic rock. Lors de la première édition, spectateurs et artistes ont quitté le stade quasiment en lévitation. Pour ce nouveau rendez-vous, nous sommes en train de chercher des invités qui pourraient jouer avec ce groupe amateur. On aimerait avoir un, deux ou trois artistes de renom comme le guitariste de Trust Nono Krief, alias Nono, qui était venu en 2019. On essaie de faire le meilleur programme de tous les temps. Ce sera encore une fois une expérience à la fois unique et collective. Après le confinement, on en a assez de voir des artistes se présenter seuls devant leur écran pour jouer de la guitare (rires). On veut désormais écouter un groupe en live !
L’ombre du Covid-19 plane-t-elle néanmoins sur cette organisation ?
C’est un grand chambard actuellement dans le monde du spectacle. Tous misent sur un retour pour les mois de septembre, octobre et novembre. Les salles de spectacle connaissent un embouteillage de leurs concerts et événements. Mais nous sommes face à une grande incertitude. Il faut prier pour que le virus ne revienne pas afin d'éviter un nouvel arrêt de la création et un report des tournées.
Vous assurez le rôle de maître de cérémonie, mais aussi celui de programmateur. La playlist qui sera jouée le 17 juillet 2021, est-elle déjà définie ?
La programmation musicale sera déterminée en fonction des invités que nous aurons. Le concert étant dans un an et quelques jours, nous avons encore le temps de l’affiner, de la peaufiner. Les 1 000 rockeurs sélectionnés ont néanmoins une playlist de travail à disposition pour s’entraîner. Elle se compose, entre autres, de morceaux de Led Zeppelin ou du titre «Won’t Get Fooled Again» des Who.
Les claviers feront par ailleurs leur entrée…
Nous avions beaucoup de demandes. Pour un musicien amateur, les probabilités de jouer au Stade de France sont extrêmement minces. En ce qui me concerne, cela me permet d’enseigner le classic rock aux «enfants», et de leur expliquer par exemple que «You Really Got Me» des Kinks se joue de telle ou telle manière. Et les effets stéréo que nous avons dans le stade garantit un résultat très probant. «Rockin’1000» est l’avenir du rock.
Paris manque d'un grand festival rock.
Le rock doit-il, selon vous, se réinventer ?
Dave Greenfield, claviériste des Stranglers, Moon Martin, Little Richard, le roi du rock, ou encore le fabuleux Christophe… De nombreuses personnalités importantes pour nous, les rockeurs, sont mortes pendant cette épidémie, touchées ou non par le Covid-19. On assiste donc à la disparition des rockeurs de la première génération car nul n’échappe au sort commun. Le rock doit se renouveler. Et Paris manque d’un grand festival rock. Il y a «Rock en Seine» qui essaie de s’en sortir tant bien que mal. Mais on pourrait imaginer que «Rockin’1000» devienne une grande fête rock annuelle avec des animations, à l’image du Hellfest en Bretagne (le plus grand festival rock metal en Europe, ndlr).
Quel regard portez-vous sur la scène rock d’aujourd’hui ?
Elle n’existe pas, tout simplement parce que les maisons de disque ont décidé unilatéralement de ne plus signer de groupe de rock. Les BB Brunes ont été les derniers à signer en 2005. Quinze ans plus tard, il n’y a aucune formation engagée par l’une des trois majors que sont Sony, Universal ou Warner. Celles-ci se consacrent aux musiques urbaines, à ce hip hop à base de vocodeur que les gens écouteraient en allant au travail et qui leur donneraient de la force. Les rockeurs qui résistent sont souvent reclassés chez des labels indépendants.
Il reste heureusement les Rolling Stones, groupe qui berce votre vie depuis toujours. Qu'avez-vous pensé de leur performance lors du concert virtuel «One World, Together At Home» organisé par Lady Gaga pendant le confinement ?
J’ai trouvé cela formidable. Et c’est drôle de voir Charlie Watts en train de jouer «You Can’t Always Get What You Want» sur une batterie invisible. Et ils ont aussi sorti le très joli «Living in a Ghost Town» qui restera le morceau du confinement. Alors que Pink Floyd et Led Zeppelin se sont arrêtés de manière chaotique, les Rolling Stones figurent parmi les derniers survivants de la grande époque des années 1960. Les rockeurs ne sont plus le fer de lance des mouvements de jeunesse. Les maisons de disque ont choisi d’autres horizons.
Le 19 juin dernier, vous avez fêté vos 66 ans. Vous considérez-vous encore comme un «soldat du rock» ?
Mais plus que jamais ! Je suis en train de terminer deux livres sur le rock qui paraîtront en octobre ou novembre, je m’occupe de «Rockin’1000», et je suis invité dans l’émission des «Grosses Têtes» sur RTL pour parler de rock. Je suis très fier d’être un rockeur qui est encore loin d’être à la retraite.
Quelle est votre définition du rock ?
De 1954 à 2005, le rock a longtemps été la musique préférée des jeunes gens qui souhaitaient faire passer des messages, chanter leur vision de la société, exprimer des cris de rage ou de colère. C’est une bête qui refuse de mourir, qui continue à se débattre. On nous a laissés plusieurs fois pour morts, mais nous bougeons encore.