La plupart des grandes institutions musicales et lyriques jouent le jeu du confinement et mettent à disposition des amateurs de nombreux contenus gratuits en ligne, sous forme d'archives ou de spectacles qui devaient avoir lieu, et qui ont pu être captés à temps pour une diffusion via le web. De son côté, l'Opéra de Paris continue d'approvisionner sa « 3eme Scène » en oeuvres originales et décalées, avec un succès toujours grandissant.
Les maisons Garnier et Bastille n'ont donc pas attendu l'arrivée du confinement généralisé pour offrir au public, cette plate-forme originale et au contenu exclusif, dont les sujets tournent tous plus ou moins autour des univers «de la musique, de la danse, de l’Opéra de Paris, son patrimoine, ses métiers et l’architecture de ses lieux», selon l'institution. Ce contenu très varié, touchant à tout l'univers de la création artistique, est enrichi d'une oeuvre inédite tous les mois.
Véritable fil de laine que l'on déroule au gré de ses envies, on y trouve de très grands noms du monde culturel, avec le plaisir de les découvrir bien souvent sous un autre jour, comme si on entrait un peu plus dans leur intimité artistique. Plasticiens, cinéastes, compositeurs, photographes, chorégraphes, écrivains ou encore dessinateurs, tous jettent des ponts entre les disciplines, pour des résultats le plus souvent surprenants.
Dernière carte blanche de l'Opéra de Paris, celle offerte à Hugo Arcier, spécialiste des effets numériques et 3D ayant travaillé avec Alain Resnais ou Jean-Pierre Jeunet. Avec son oeuvre Clinamen, il invite pendant près de dix minutes à la balade à travers l'enceinte du majestueux Opéra Garnier, sublimé par des images de synthèse et la technique du motion capture.
Trois danseurs stylisés se lancent alors dans une chorégraphie, les menant dans un Paris futuristes, au son d'une musique d'ambiance envoûtante, presque inquiétante. Cette dernière contribution vient s'ajouter à la soixantaine d'oeuvres déjà existantes, et toujours disponibles sur le site.
Comme pour une malle aux trésors, on y trouve de véritables pépites, comme le dérangeant film «Degas et moi», d'Arnaud des Pallières. On découvre, entre danse et dessin, le peintre Edgar Degas, le peintre qui a tant représenté l'univers des ballerines, joué par Michael Lonsdale. Au fil des sublimes images grimées en archives, son discours se fait plus noir, reflétant les penchants antisémites du peintre.
D'autres créations valent le détour, comme cette courte et enfiévrée adaptation, par Clément Cogitore, de l'opéra ballet «Les Indes Galantes», de Rameau, et son célébrissime air des «Sauvages». La troupe, dans une ambiance contemporaine et urbaine, abolit les siècles et se lance dans des battles de Krump, une danse née dans les ghettos de Los Angeles.
Un dispositif né en 2015, dans une relative confidentialité, mais qui a su transcender les disciplines et les publics bien au-delà des univers de la danse et de l'opéra, comme le rappellent les chiffres de visionnages. 5,4 millions de vues sur Youtube ont été comptabilisées, mais, surtout, les curieux viennent de partout : près de la moitié des internautes viennent de l'étranger, et sont pour 48% d'entre eux âgés de 15 à 34 ans. De même, plus de 100 festivals dans le monde ont déjà projetés des films issus de la «3eme Scène».
Pour venir en complément de ce portail, né avant le coronavirus et qui lui survivra, l'Opéra de Paris a, dès le début du confinement en France, mis à disposition, à raison d'une nouvelle oeuvre tous les six jours, ses spectacles (ballets et opéras) qui ont fait l'objet d'une captation. En ce moment, les afficionados peuvent se délecter du classique du ballet Le Lac des Cygnes jusqu'au 5 avril. Du 6 au 12 avril, c'est le pétillant et revigorant Barbier de Séville qui sera diffusé.