Chaque automne, il y a certes le retour des bons coins à champignons, mais ce sont avant tout les Prix Littéraires qui font l'évènement... et l'assurance de cadeaux de Noël de qualité. L'année 2019 n'en est pas exempte. Petit résumé pour ceux qui n'auraient pas eu le temps de suivre la bataille (ou étaient aux champignons).
Le plus lettré
Le Grand Prix de l'Académie Française est traditionnellement le premier Prix littéraire de l'automne. Ce sont les académiciens qui se réunissent pour rendre leur verdict. En 2019, c'est Laurent Binet et son «Civilizations» (Grasset) qui a reçu les honneurs des Immortels.
L'auteur imagine dans ce roman ce qui aurait pu survenir si Christophe Colomb n'était jamais revenu de son expédition dans le Nouveau Monde mais à sa place les Incas, qui s'aventurent à envahir l'Europe et à distiller leur religion et leurs coutumes. La langue est en effet extrêmement travaillée selon le récit des protagonistes. Laurent Binet signe là une magnifique fresque historique inversée.
«Civilizations», de Laurent Binet, 384 p., Grasset, 22 €.
Le plus prestigieux
Le Prix Goncourt a été rendu le 4 novembre 2019. Alors que les articles pleuvaient sur Amélie Nothomb qui aurait bien pu se voir couronnée du Graal de la littérature française, c'est le discret mais formidable Jean-Paul Dubois et son «Tous les hommes n'habitent pas le monde de la même façon» (éd. de l'Olivier) qui a remporté la mise.
Après avoir reçu le Femina et le prix du roman Fnac en 2004 pour «Une vie française», le journaliste et écrivain toulousain ajoute donc une corde à son arc avec le plus prestigieux des prix qui pourtant ne rapporte que dix euros à son récipiendaire. Les ventes, elles, atteignent en général des chiffres à en faire pâlir plus d'un.
Le plus doublé-gagnant
Karine Tuil a fait coup double en cette année 2019 en remportant, avec «Les choses humaines» (Gallimard) le Prix Interallié, déjà respecté, mais dès le lendemain le très prescripteur Prix Goncourt des lycéens. Avec ce onzième roman, l'écrivaine raconte une affaire de viol suivie de son procès, vu par les différents protagonistes, leur entourage et les jurés d'assise. Un prix dans l'esprit #Metoo et surtout un roman sensible et intelligent autour de la violence sociale des tribunaux populaires, qui n'a pas attendu ces prix pour être un succès de librairie.
«Les choses humaines», Karine Tuil, 352 p., Gallimard, 21€.
Le plus Nature
Comme la tradition l'exige, le Prix Renaudot a été annoncé le même jour que le Goncourt, et ce, seulement quelques minutes après. Le Renaudot cette année a donc été remis à Sylvain Tesson pour «La Panthère des neiges» (Gallimard). Beaucoup moins soumis à des règles strictes, le jury du Renaudot peut décider à la dernière minute d'élire un livre qui ne figurait pas dans la dernière sélection. C'est ce qui est arrivé en 2019 puisque Sylvain Tesson n'était pas sélectionné et fut donc une surprise, d'autant plus que ce livre n'est pas un roman mais le récit, tinté de philosophie, d'une expédition au Tibet en compagnie du photographe Vincent Munier, afin d'apercevoir la mythique panthère des neiges.
«La panthère des neiges», de Sylvain Tesson, 176 p., Gallimard, 18€.
Le plus féminin
Créé en 1904 en réaction à l'attribution systématiquement masculine du Prix Goncourt, le Prix Femina possède un jury uniquement féminin. En 2019, il a été attribué le 5 novembre à Sylvain Prudhomme pour «Par les routes» (Gallimard) dans la catégorie romans français, un roman sur l'amitié et le vertige de se choisir une existence face à la multitude des possibles, le Femina étranger a été décerné à Manuel Vilas pour «Ordesa» (éd. Sous-sol). Le Femina essai 2019 est revenu, lui, à «Giorgio Furioso» d'Emmanuelle Lambert (éd.Stock).
«Par les routes», de Sylvain Prudhomme, 304 p., Gallimard, 19 €.
«Ordesa», de Manuel Vilas, 400p., éd. du Sous-sol, 21,80€.
«Giorgio Furioso», d'Emmanuelle Lambert, 280 p., éd. Stock, 18,50€.
Le plus Outsider
Le Prix Médicis a été rendu le 8 novembre dernier. Composé de huit personnes, le jury remet traditionnellement son prix, deux jours après le Femina, et ce, à un auteur considéré comme encore «confidentiel». Dans la catégorie des romans français, c'est Luc Lang pour «La Tentation» (éd. Stock) qui s'est vu récompensé, une histoire familiale autour de la rédemption. Le Médicis étranger a été attribué à l'Islandaise Audur Ava Ólafsdóttir pour «Miss Islande», traduit de l'islandais par Eric Boury (Zulma). Le Médicis essai a été attribué à Bulle Ogier et Anne Diatkine pour «J'ai oublié» (Seuil).
«La tentation», de Luc Lang, 360 p., éd. Stock, 20€.
«Miss Islande», d'Audur Ava Ólafsdóttir, 288p.,éd. Zulma, 20,50€.
«Jai oublié» de Bulle Ogier et Anne Diatkine, 240 p., éd. du Seuil, 19€.