Vous prendrez bien un ultime western pour la route ? Avec «Jusqu'au dernier», le monde de la BD s'enrichit d'un sublime récit, baigné de lumière et à la violence sourde.
L'histoire - en un seul tome - prend place dans le Montana. Russell, cow-boy fatigué, sent que les hommes comme lui n'ont plus vraiment d'avenir. Les têtes de bétail seront bientôt transportées jusqu'à Chicago par le rail et les traditionnels convois vont disparaître de la prairie. C'est dans ce contexte tendu, le cœur plein d'amertume, qu'il décide de faire une halte dans une petite ville, avec toute sa bande. Comme d'habitude, Bennett, un jeune garçon un peu simplet, qu'il a pris sous son aile il y a quelques années l'accompagne. Or, tout va déraper, quand Bennett est retrouvé mort, le crâne fracassé.
UN récit à bout portant
Pas question pour le maire de la petite ville d'admettre qu'il y a un assassin parmi ses concitoyens. A partir de là, la tension monte de trois crans. Et pour le lecteur, elle devient palpable, page après page. Le talent du duo aux manettes est évidemment le principal responsable. Avec Jérôme Félix et Paul Gastine, déjà auteurs de la série L’Héritage du diable, aux éditions Bamboo, on n'a clairement pas affaire à des amateurs.
Jusqu'au dernier n'est pas la grande fresque à laquelle on aurait pu s'attendre, mais un récit intimiste, à bout portant. Un huis clos au milieu du Grand Ouest.
UN sans-faute artistique
Il y a du Clint Eastwood dans cette histoire, notamment ses derniers westerns, comme le magistral Impitoyable. Un cow-boy fatigué, pris dans une histoire dont il ne veut pas vraiment au départ... Pour retranscrire cette ambiance crépusculaire, Paul Gastine a fait des merveilles. Les décors sont par exemple incroyables, et fourmillent de détails. Mais ce qui frappe le plus est sa capacité à donner vie à ses personnages de papier. Leurs visages sont criants de vérité, que ce soit face à la lumière crue du soleil ou dans la pénombre autour d'un feu de camp. A 33 ans, l'artiste est déjà au niveau des plus grands.
UNe LECTURE qui en appelle d'autres
Ces dernières années, les one-shot (un histoire complète en un seul album), dont fait partie cet albul, se sont multipliés dans le monde de l'édition BD, et c'est une bonne nouvelle. Pour le lecteur novice, c'est en effet une belle opportunité de découvrir un genre à part, totalement adapté à ce médium, et qui passionne depuis des décennies. Alors que des séries fleuves font figure de classiques (Blueberry, Durango...) d'autres, plus atypiques, se constituent une belle notoriété (Stern, Undertaker...), «Jusqu'au dernier» joue les outsiders avec une fraîcheur étonnante. Il frappe vite et fort, laissant le lecteur groggy.
Voici les premières pages, en forme d'avant-goût :
Jusqu'au dernier, Histoire complète, de Félix et Gastine, éd. Grand Angle