Présenté à Cannes hors compétition, en présence de Sir Elton John, le biopic «Rocketman» revient sur les jeunes années de la star faites de succès et de déboires. Une «fusée» en forme de comédie musicale dans laquelle on embarque avec délice.
«Mon nom est Elton Hercules John. Je suis alcoolique, cocaïnomane, accro au sexe, avec quelques problèmes avec la weed et des difficultés à gérer ma colère».
Dès la scène d'ouverture qui se déroule dans un centre de désintox, les spectateurs sont prévenus. Dexter Fletcher ne livrera pas un portrait édulcoré de l'icône de la pop, et «Rocketman», actuellement en salle, ne fera aucune impasse - ou presque - sur ses frasques et sa descente aux enfers. Une décision en accord avec l’intéressé – coproducteur du biopic – qui voulait présenter «une version la plus honnête possible» de sa vie.
Son don inné pour reproduire les mélodies au piano, son entrée à la Royal Academy of Music de Londres, ses premiers concerts au Troubadour à Los Angeles, sa rencontre avec son âme-sœur musicale, le parolier Bernie Taupin (Jamie Bell), mais également ses addictions et sa relation toxique avec John Reid (Richard Madden)... rien n’a été laissé de côté, montrant, dans une mise en scène intelligente et rythmée, l’ascension de Reginald Dwight, ce gamin timide devenu une bête de scène mondialement reconnue sous le pseudonyme d’Elton John. Une légende gay qui n’aura eu de cesse de chercher la reconnaissance de ses proches, à commencer par celle de son père distant et homophobe. Sa plus grande blessure.
Jouant parfois avec la temporalité, Detxer Fletcher a conçu son long-métrage comme une comédie musicale où les personnages se répondent en chansons pour faire part de leurs émotions. Les tubes d’Elton John, comme «Your Song», servent à nourrir le récit qui se déroule sur une vingtaine d’années. Quant aux chorégraphies enlevées et parfaitement maîtrisées, elles apportent un peu de légèreté pour faire de «Rocketman» un grand spectacle populaire.
Mention spéciale à Taron Egerton qui incarne un Elton John plus vrai que nature, à tel point que l’on pourrait le confondre, dans certaines scènes, avec l’icône aux 300 millions d’albums vendus. S’il ne semblait pas, de prime abord, le plus à même pour incarner cette légende excentrique, le héros de «Kingsman» convainc par son interprétation et sa capacité à chanter chacun des tubes de ce long-métrage. Totalement métamorphosé, et brillant dans des costumes extravagants, l’acteur semble comme habité par ce rôle qui pourrait lui valoir la même reconnaissance que pour son acolyte Rami Malek, oscarisé pour «Bohemian Rhapsody», biopic finalisé par ailleurs par Dexter Fletcher, après le renvoi fracassant de Bryan Singer.
On ressort de la projection émus et touchés, mais avec l’irrésistible envie d’aller esquisser quelques pas devant l’entrée du Carlton, en tuniques et académiques, à l’image de la star dans le clip «I’m still standing», tourné en 1983 sur la Croisette.