Décédé mercredi soir, Jean-Pierre Marielle laisse derrière lui une filmographie impressionnante. C’est sans compter sa carrière au théâtre, qui le lui rendra bien, d'ailleurs. Il avait décroché, en 1994, le Molière du meilleur comédien pour sa prestation dans «Le retour» d’Harold Pinter.
A l’occasion d’une interview accordée à CNEWS en 2010 pour son rôle dans «Audition», une pièce de Jean-Claude Carrière mettant notamment en scène un jeune comédien face à un habitué sur le point de passer un essai, Jean-Pierre Marielle revenait avec l’espièglerie et le flegme qu’on lui connaît sur sa vision du métier, des rencontres et son parcours.
A l’époque, l’affiche interpelle. Jean-Pierre Marielle face à Manu Payet. Pas pour Jean-Pierre Marielle : «Moi je peux jouer avec un centenaire ou un gamin de 18 ans. S’il est bon, c’est ce qui compte. Je ne me rends pas compte des générations. Nous nous sommes rencontrés, nous nous sommes bien entendus et maintenant, nous jouons ensemble et passons de bons moments».
«C’est vraiment un métier d’une facilité incroyable»
Une simplicité qui colle à l’homme et à la vision qu’il avait de sa carrière :
«Vous savez, j’ai commencé la comédie au lycée comme ça. A l’époque, je voulais faire Khâgne et mon professeur de lettre m’a dit: “Si j’étais vous, je me présenterais au conservatoire, vous avez des dons”. Ce que j’ai fait. Puis, j’ai été pris comme stagiaire au Français et puis les premiers rôles ... Ce jour- là mon père a dit : “c’est vraiment un métier d’une facilité incroyable.”
Il n’aura pas connu non plus le stress des auditions : « Je n’ai jamais passé d’audition. Parce que j’étais au Conservatoire et que le chemin était tracé. Après avoir été stagiaire à la Comédie Française pendant un an, j’ai été engagé dans les petits théâtres. J’ai commencé au théâtre de la Huchette, au théâtre Babylone, dans les petites salles de la rive gauche, au cabaret de Guy Bedos. Ça s’est fait comme ça. Mes potes c’était Jean Rochefort, Belmondo, Françoise Fabian.»
Quand on lui demandait si les choses avaient changé à son sens, il assénait, taquin : « Parce que les choses ont changé ? » avant de poursuivre : « Aujourd’hui, n’importe quel ringard donne des cours de théâtre. Faire du théâtre quand j’avais 18 ou 19 ans, c’était un événement. Maintenant, c’est normal ».
«Il ne faut jamais donner de conseils»
Lui qui aurait pu donner quelques conseils à la jeune génération n’en était d'ailleurs pas friand :
«Il ne faut jamais donner de conseils. Ils ne servent à rien ou plutôt à une chose, à ce qu’on ne les suive pas! Si jamais j’avais suivi les conseils… je serais dans un drôle d’état. Je suis quand même dans un drôle d’état» s’amusait-il. «Et puis de tout façon, une collaboration ça colle ou pas. Comme des musiciens, tout d’un coup, on improvise et ça marche. Manu Payet est au saxo alto et moi je suis au baryton». Avant de conclure, en grand maître : « L’expérience, ça ne se distribue pas ». La sienne va manquer au cinéma et au théâtre français.