Les frères Coen, Palme d'or à Cannes en 1991, ont présenté dimanche sur la Croisette "Inside Llewyn Davis", film nostalgique et drôle sur le Greenwich village de 1961 et la musique folk qui commençait tout juste à y résonner, avant l'arrivée de Bob Dylan.
A défaut de pouvoir embaucher le maître ou le trio Peter, Paul and Mary, Joel et Ethan Coen ont jeté leur dévolu sur l'étoile montante du cinéma américain, Oscar Isaac, 33 ans ("Robin des Bois", "Drive"), mais aussi la star planétaire pop Justin Timberlake.
Dans ce film bourré d'humour où la musique est un personnage central et les chansons interprétées en direct, Oscar Isaac/Llewyn Davis se révèle un musicien et chanteur de folk accompli, tandis que Timberlake, son ami dans le film, quitte la pop pour la musique folk avec une contagieuse jubilation.
Quant à Carey Mulligan, elle quitte les riches atours de Daisy Mulligan dans "Gatsby le magnifique" pour des vêtements moins reluisants, une voix douce quand elle chante, mais le juron débité à la mitraillette.
"Inside Llewyn Davis" raconte sur une semaine les tribulations d'un chanteur de folk (Oscar Isaac) qui n'arrive pas à percer et se fâche avec la terre entière.
Il accepte à reculons les remplacements au pied levé dans les studios. Sans logement, il fait la tournée des canapés de ses amis qui veulent bien encore le recevoir.
un air de documentaire
"Sa relation avec le succès est torturée, c'est cela qui nous intéressait: un mélange de malchance, un gars qui n'est pas là au bon moment, qui n'est pas carriériste mais intègre, avec un comportement autodestructeur", a déclaré à la presse Ethan Coen, couronné avec son frère Joel de plusieurs Oscars et prix à Cannes.
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Si Llewyn Davis n'a pas existé, les deux cinéastes fans de musique folk ont bâti leur histoire sur de vraies personnalités de l'époque comme le musicien folk Dave Von Ronk.
L'idée était de montrer le moment précédant l'avènement de Greenwich village, ce quartier de New York appelé à devenir "l'épicentre de l'essor de la musique folk qui engendrerait des stars internationales" comme l'écrit le journaliste Elijah Wald, ami de Van Ronk.
Le film prend alors des allures de documentaire, du label de musique poussiéreux envahi de 33T invendus habité par une vieille secrétaire impayable, aux choix musicaux des studios de l'époque et aux cafés où se produisaient les chanteurs.
La magie des frères Coen opère encore en intégrant un drôle de personnage qui traverse le film en permanence: un magnifique chat roux au regard craquant, compagnon de fortune de Llewyn Davis.
Interrogé sur la façon dont il a composé son personnage, l'acteur et chanteur Justin Timberlake a rappelé avoir "grandi dans le Tennessee, baigné par le blues et la country".
"Mes premières leçons de musique m'ont été données par mon grand-père qui m'a appris à jouer de la guitare", a-t-il poursuivi.
Pour Justin Timberlake, si le travail est nécessaire pour "être considéré comme bon", "le hasard peut aussi lancer la carrière de quelqu'un", et "de plus en plus aujourd'hui".
Comme Llewyn Davis qui refuse tout compromis sur sa musique, la star pop explique que dans une carrière, "le plus important c'est de ne pas se laisser coincer par tout ce qui peut nous empêcher de nous exprimer".