La chanteuse américaine Madeleine Peyroux, qui sera le 4 mai au festival Jazz à Coutances et le 8 mai à Paris (Olympia), plonge dans son nouvel album "The Blue Room" (Universal), dans les eaux sombres dont elle est familière, après quelques chansons ensoleillées tirées d'un album culte de Ray Charles.
Après quelques morceaux issus de "Modern Sounds of Country and Western Music Vol.I et II", disques parus au début des années 60 où Ray Charles mêlait soul, jazz, gospel et country music, le climat de l'album devient rapidement plus désenchanté.
S'enchaînent des reprises de chansons où il est question d'amours brisées, de solitudes, d'individus alcooliques ou "accros" aux drogues dures, d'illusions perdues, avec deux versions déchirantes de "Gentle on my mind" (John Hartford) et "Desperadoes under the Eaves" (Warren Zevon).
Les vagues de cordes, dont les arrangements sont signés Vince Mendoza, accentuent encore le tragique de ces chansons.
Madeleine Peyroux offre aussi une version magistrale de "Bird on a Wire" de Leonard Cohen, son auteur fétiche, qui n'est pas non plus réputé pour son caractère enjoué.
Grande part de mystère
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La chanteuse a toujours conservé une grande part de mystère. On sait qu'elle est née à Athens en Georgie il y a une quarantaine d'années, d'un père d'origine acadienne et d'une mère professeur de français, mais aucun site ni dictionnaire ne mentionne sa date exacte de naissance.
Tout au plus sait-on qu'elle a quitté le lycée vers l'âge de 15 ans, s'est aventurée à Paris et en Europe dans les années 80 où elle chante avec The Riverboat Shufflers, un groupe de rue, et intégré le Lost Wandering Blues And Jazz Band à New York au début des années 90.
"Dreamland", son premier album en 1996 la sort de l'anonymat: sa manière d'interpréter des chansons des années 30 entre jazz, folk et blues, d'une voix douce mais brisée, la fait comparer à la grande Billie Holiday.
La comparaison était sans doute trop lourde à porter pour cette femme introvertie, tourmentée et farouche, subitement placée sous le feu des projecteurs : elle disparaît pendant huit ans, n'interrompant qu'en 2004 un long silence discographique avec "Careless Love".
Depuis, malgré une nouvelle fugue qui poussa sa maison de disques à engager un détective pour la retrouver à... Paris, Madeleine Peyroux s'est stabilisée, et publie des disques à intervalles réguliers.
Elle est aussi devenue une artiste "crossover", ouvrant largement son catalogue avec, aux côtés de chansons de Bessie Smith, d'autres plus contemporaines de Bob Dylan, Tom Waits, John Lennon ou Elliot Smith.
Cette francophile s'attaque aussi parfois aux mythes de la chanson hexagonale, comme Edith Piaf ("La Vie en rose"), l'une de ses héroïnes, Serge Gainsbourg ("La Javanaise"), ou Joséphine Baker ("J'ai Deux Amours").