Potage de testicules de chevreau, délices d'épluchures, crabe de Patagonie ou spécialités tribales de Bornéo : le livre de cuisine, secteur de l'édition en pleine expansion, déborde d'imagination pour faire découvrir, mijoter et déguster les trésors culinaires de la planète.
Ce succès mondial s'est traduit par "une croissance moyenne de 2 et 5% en Europe et de 30% en Chine depuis 10 ans", se réjouit Edouard Cointreau, descendant de Rabelais et fondateur du Festival international du livre culinaire dont la troisième édition se tient jusqu'à dimanche au 104 à Paris.
En France, la production annuelle est passée en dix ans de 816 à 1.838 titres, enregistrant une progression de 5% en 2011 et, si l'on se fie à la diversité des auteurs et à leurs approches éclectiques de la cuisine, les descendants de Ginette Mathiot ont de beaux jours devant eux.
Et c'est partout pareil, ajoute M. Cointreau, en désignant un nouvel espace d'exposition où sont présentés les ouvrages culinaires de 135 pays et notamment ceux d'Amérique latine, venue en force. "Du Paraguay au Venezuela ou au Chili, en passant par le Bénin, le Togo, la Grande-Bretagne, l'Allemagne ou la Chine, invitée d'honneur du salon, il n'y a pas de limite", ajoute-t-il.
C'est un livre chilien sur la cuisine de Patagonie qui a remporté le prix du meilleur livre de cuisine étranger (Patagonia Cuisine). "Comme l'odeur d'une Patagonie originelle", dit à l'AFP l'auteur, Francisco Fantinti Jarpa, également directeur de la jeune maison d'édition Gourmet Patagonia.
On y découvre notamment les mets favoris de "pêcheurs en kayak" : les crabes, le poisson fumé au bois de cyprès et des coquilles Saint-Jacques d'eau douce au miel d'Ulmo, arbre ancestral du Chili.
"C'est un voyage qui parle d'une partie de la planète qui n'est pas polluée, on associe les aliments et la géographie, la nature. Cela envoie à un mode de vie communautaire ancien, solidaire et écologique, dont rêvent nombre de gens", ajoute-t-il.
"Couilles au nid"
En Malaisie, le chef Wan, star en son pays, réinvente les recettes des coupeurs de têtes de Bornéo, "rendang" (boeuf au curry), "satay" (brochettes), nasi lemak (riz crémeux) et autres merveilles à base de coco râpé ou de feuilles de citronnelle.
Les auteurs sont soutenus par d'audacieux éditeurs à l'instar de Sabine Bucquet-Grenet, directrice des éditions de l'Epure, dont les petits recueils culinaires, façon cahiers d'écolier, autour d'un seul ingrédient (courgette, pain sec, araignée de mer...) ont fait la réputation.
L'éditrice dit adorer "jongler avec les aliments, la littérature et l'humour". Après les "épluchures", écrit par une cuisinière lyonnaise, elle n'a pas hésité à publier "Testicules" de Blandine Vié. "Ma grande fierté c'est d'avoir signé avec un éditeur anglais", dit-elle.
"Couilles au nid", "petit potage de testicules de chevreau", "animelles sautées en persillade", "rognons blancs pochés aux épices douces"....Outre d'innombrables recettes, anecdotes historiques et littéraires, on découvre que les précieuses parties du coq, du taureau ou du poulain firent les délices de la cour de Louis XV, un hors d'oeuvre réputé de la cuisine bourgeoise du XIXe et continuent de ravir les papilles, surtout "en paires".
"Excellent !", commente Tom Jaine de Prospect Books qui a édité le livre en anglais (Balls in cooking and culture), en expliquant que "la traduction de certains mots d'argot tirés des +San Antonio+ a été délicate".
Du héros de Frédéric Dard aux truands siciliens il n'y a qu'un pas, qu'Agnès Viénot a franchi en publiant "A table avec la mafia", livre de recettes italiennes inspirées de la saga des Corleone de Francis Ford Coppola.