Mahershala Ali a décroché l'Oscar du meilleur second rôle dimanche pour son interprétation d'un trafiquant de drogue au grand coeur dans «Moonlight», et devient le premier acteur musulman à recevoir cette prestigieuse statuette.
L'acteur caméléon de 43 ans, tout récent papa d'une petite fille née mercredi, joue aussi un mari idéal dans «Les figures de l'ombre», qui avait trois nominations dimanche. «Je veux remercier mes professeurs, tant d'excellents professeurs et une chose qu'ils n'ont pas arrêté de me dire constamment (...) : ce n'est pas à propos de toi. C'est à propos des personnages. Tu es un serviteur, tu es au service de ces histoires et de ces personnages et j'ai vraiment de la chance d'avoir eu cette opportunité», a-t-il déclaré en venant recevoir son prix. «Peu importe votre religion ou comment vous voyez la vie, comment vous priez Dieu. En tant qu'artiste votre travail reste le même, essayer de dire la vérité», a-t-il également dit après être descendu de la scène.
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Mahershala Ali n'a pas manqué de remercier le reste des acteurs jouant à ses côté dans «Moonlight», et sa femme, qui a accouché mercredi et l'a soutenu tout au long de la saison des récompenses alors qu'elle en était à son troisième trimestre de grossesse.
Dans «Moonlight», de Barry Jenkins, qui a remporté l'Oscar du meilleur film, Mahershala Ali incarne Juan, dealer cubain qui se prend d'affection pour un petit garçon maltraité par sa mère droguée... et découvre qu'elle est l'une de ses clientes. Révélé au grand public pour son rôle de chef de cabinet de la Maison Blanche dans la série à succès de Netflix «House of Cards», il avait déclaré en recevant un prix du syndicat des acteurs d'Hollywood (SAG) le mois dernier que «Moonlight» illustrait «ce qui se passe lorsqu'on persécute les gens : ils se replient sur eux-mêmes».
Après deux années de vives polémiques à cause d'une sélection d'acteurs entièrement blancs aux Oscars, Ali fait partie du record de six acteurs noirs qui étaient finalistes cette année. Apprenant sa sélection, il avait déclaré : «J'espère que je n'ai pas été nommé parce que je suis noir» mais «pour mon travail».
Né à Oakland, près de San Francisco en Californie, d'une mère ministre protestante et d'un père acteur, Mahershala (diminutif de Mahershalahashbaz) Gilmore a pris pour nom de famille Ali lorsqu'il s'est converti à l'islam en 1999. Il découvre l'art dramatique pendant ses études de communications et sport en Californie, puis suit des cours de théâtre à la prestigieuse New York University. Il fait ses débuts dans des séries télévisées policières comme «New York Police Blues», «Les experts», «FBI : opérations secrètes», entre autres.
Débuts au cinéma face à Brad Pitt
Ses premiers pas sur grand écran dans le film de David Fincher «L'étrange histoire de Benjamin Button», l'introduisent dans la cour des grands : il donne la réplique à Brad Pitt et Cate Blanchett. Il enchaîne en détective aux côtés d'Harrison Ford dans «Droit de passage» (2009), puis le film de science-fiction «Predators» (2010) avant «The place beyond the pines» (2013), où il incarne le rival de Ryan Gosling pour les beaux yeux d'Eva Mendes. Ali est ensuite à l'affiche de la saga post-apocalyptique «The Hunger Games», avant de jouer dans la série de Netflix sur un super-héro noir, «Luke Cage», diffusée l'an dernier.
2016 voit sa carrière accélérer : en plus des «Figures de l'ombre» et «Moonlight», il est au générique de «Free state of Jones», en esclave fugitif face à Matthew McConaughey. Face à la controverse générée par le décret migratoire du président américain Donald Trump, qui prévoyait l'interdiction d'entrée aux Etats-Unis aux ressortissants de sept pays musulmans avant d'être suspendu par les tribunaux, Ali a parlé des discriminations qu'il a subies. «J'ai été interpellé en voiture, on m'a demandé où était mon arme, si j'étais un maquereau, ma voiture a été démontée. Les musulmans vont ressentir qu'il y a cette nouvelle discrimination qu'ils n'avaient pas ressentie avant, mais ce n'est rien de nouveau pour nous».