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Olivier Dacourt : «Le racisme est partout dans les stades»

Olivier Dacourt est allé à la rencontre de plusieurs stars du ballon rond pour son nouveau documentaire. Olivier Dacourt est allé à la rencontre de plusieurs stars du ballon rond pour son nouveau documentaire.[Canal+]

Un an après le succès de «Ma part d’ombre», Olivier Dacourt propose un second documentaire «Je ne suis pas un Singe», qui traite du sujet toujours très sensible du racisme dans le football. Avec ce nouveau volet, diffusé ce dimanche 6 janvier à 21h sur Canal+, le consultant de la chaîne cryptée, qui est notamment allé à la rencontre de plusieurs joueurs victimes de racisme, a l’espoir de faire enfin bouger les choses.

Le documentaire est en plein dans l’actualité avec l’affaire Kalidou Koulibaly…

On a commencé le documentaire il y a un an lorsque Blaise Matuidi avait été victime d’insultes racistes en Italie (face à Cagliari). Même si on n’avait voulu le programmer ou l’anticiper, on n’aurait malheureusement pas pu mieux tomber.

Pourquoi avez-vous voulu faire ce documentaire ?

Le 6 janvier dernier, le premier documentaire «Ma part d’ombre» était diffusé. Et le même jour, il y a eu ces incidents avec Blaise Matuidi. Ce nouveau cas a été un déclic. Surtout que dans le premier documentaire, Zlatan Ibrahimovic avait justement évoqué le racisme qu’il avait pu subir. Tout de suite, j’ai eu envie de traiter ce sujet.

Avez-vous envie de faire passer un message ?

Je ne suis pas militant et je ne revendique rien. Mais malheureusement rien ne change. Cela fait plusieurs années que les actes se multiplient dans les stades. Mes premiers souvenirs remontent à quand j’étais plus jeune avec Joseph-Antoine Bell (ancien gardien camerounais) qui recevait des bananes. Trente ans plus tard, on s’aperçoit que rien n’a changé.

Dans les stades, on a suffisamment d'outils pour éviter ce racismeOlivier Dacourt

Est-ce une manière de faire la lumière sur ce phénomène toujours aussi inquiétant ?

C’est avant tout un constat. Les gens ouvriront les yeux s’ils ont envie de les ouvrir. Mais il est important de faire ce constat et d’essayer de faire avancer les choses. On ne doit pas entendre des cris de singes et des insultes racistes dans un stade.

Ce racisme dans les stades n’est-il pas le reflet de cette société actuelle ?

C’est tout à fait cela. On a peur de son prochain. C’est effrayant pour l’avenir. Dans les stades, on a pourtant suffisamment d’outils pour éradiquer ce racisme avec notamment les caméras de surveillance, même si on sait très bien que cela ne va pas se faire d’un claquement de doigt. Cela va prendre du temps. Mais il faut une prise de conscience et alerter les gens. Si une personne va au stade pour faire des cris de singe pour déstabiliser un joueur par rapport à la couleur de sa peau, il faut agir et réagir au plus vite.

Comme Carlo Ancelotti a pu le faire après les insultes envers Kalidou Koulibaly…

Si cette histoire a pris une telle ampleur, c’est parce que Carlo Ancelotti a indiqué que lui et son équipe quitteraient le terrain si cela venait à se reproduire. Il a pris ses responsabilités et il faut le saluer car il faut du courage pour le faire. Grâce à ses propos, il y a eu des décisions fortes qui ont été prises. Même le maire de Milan et les pouvoirs publics ont réagi. A un moment, il faut des prises de position forte comme il a pu le faire. Et je lui dis bravo.

Mais pourquoi ne pas l’avoir fait tout de suite ?

Je n’ai pas la réponse. Mais ne serait-ce que de l’avoir dit, c’est déjà très fort. Et ce n’est pas un entraîneur noir qui le dit, c’est Carlo Ancelotti. La portée est plus grande. S’il n’avait rien dit, cela aurait pu passer comme une lettre à la poste. Les coéquipiers aussi doivent être solidaire. Dans le football, il n’y a de couleurs de peau, ni de religion. On est tous ensemble. Le football, c’est le partage, la fraternité et la solidarité.

En Europe, un pays est-il plus sujet au racisme ?

Le racisme existe aussi bien en Italie, qu’en Angleterre, qu’en France ou qu’en Espagne. Il est partout dans les stades. En France, on a l’impression que c’est dans les pays voisins. Mais il est également présent en France.

Existent-ils des solutions pour enrayer ce racisme ?

Dans certains pays, qui ont pu avoir pas mal de problèmes liés au racisme, il y a une tolérance zéro. L’Angleterre a pris des mesures radicales avec des interdictions de stade à vie. C’est un exemple à suivre. Il faut prendre des mesures radicales. La Fifa, l’UEFA ainsi que les fédérations ont un rôle à jouer. Les arbitres également. Il y a des solutions à leur disposition. Après qu’ils les appliquent ou pas, c’est un autre problème. Mais que ce soit en Espagne, en Italie, en France, ou ailleurs, les arbitres ont les moyens d’arrêter un match s’il y a des insultes racistes. Est-ce qu’ils le font ou l’appliquent ? C’est un autre problème.

Pourquoi ne le feraient-ils pas ?

Probablement à cause des enjeux sportifs, financiers… L’enjeu prime sur le jeu. Ce sont des décisions fortes à prendre. Et s’ils ne sont pas soutenus, c’est aussi compliqué pour eux de prendre des décisions. Il faut qu’il y ait une prise de conscience générale.

Avez-vous été victime de racisme lorsque vous étiez encore joueur ?

Sincèrement, je n’ai pas connu les cris de singe en tant que joueur, même en Italie. Je ne peux dire ce qu’on ressent. Dans le documentaire, Mario Balotelli me dit d’ailleurs que c’est impossible de ne pas avoir été confronté au racisme. Mais sur un terrain, j’étais toujours dans ma bulle et concentré sur le jeu. Je ne faisais pas attention à ce qu’il pouvait se passer autour. Peut-être que c’est arrivé, mais je n’ai jamais rien entendu.

Comment auriez-vous réagi ?

C’est toujours compliqué de répondre. Il y a trois semaines, j’ai vécu un épisode similaire au cinéma. On m’a dit que je n’étais pas chez moi et que je n’avais rien à faire ici. Je suis resté de marbre. C’était assez violent, d’autant que j’étais avec mes enfants. Quelle que soit la situation, on réagit tous différemment.

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