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Olivier Piton, biographe : «Kamala Harris est victime d’un procès en intrigue»

La vice-présidente reste volontairement en retrait ces derniers mois La vice-présidente reste volontairement en retrait ces derniers mois. [Andrew Harnik / POOL / AFP]

Immanquable au moment de l'investiture de Joe Biden, Kamala Harris est aujourd'hui presque portée disparue. Cantonnée à des sujets peu mis en avant, elle reste dans l'ombre du président américain. Une stratégie qui va à la fois dans son sens et dans celui de la Maison Blanche d'après Olivier Piton, auteur de «Kamala Harris, la pionnière de l'Amérique», biographie parue le 2 septembre dernier.

Alors que les démocrates ont beaucoup promis une administration Biden-Harris, la vice-présidente (VP) est relativement discrète. Pourquoi ? 

Joe Biden avait dit cela, mais c’était un propos de campagne. Il y a eu un moment clé de la campagne électorale où il s’agissait de rassembler autour de sa candidature l’Amérique progressiste diverse que pouvait représenter Kamala Harris. La réalité est sensiblement différente pour plusieurs raisons. La première, c’est qu’elle ne fait pas partie du clan Biden, et d’ailleurs elle ne faisait pas partie d’un clan, alors que la politique américaine est largement dans un système féodal. Aujourd’hui, c’est l’équipe Obama-Biden qui dirige le pays. 

De plus, l’âge de Joe Biden, 78 ans, pose un certain nombre de questions sur la candidature démocrate à la présidentielle de 2024. Même s’il a dit qu’il serait candidat, le doute est relativement permis. Et le parti démocrate n’a pas tranché. La guerre est totale au sein du parti entre l’aile centriste de Joe Biden, et l’aile radicale plus jeune et plus dynamique. Kamala Harris se situe dans la jonction entre ces deux courants, c’est d’ailleurs sa force. Mais de fait, il n’y a pas une confiance absolue du courant centriste à lui donner les futures clés du parti. Enfin, Kamala Harris est une nouvelle venue. Quand elle se présente à la présidentielle de 2020, elle n’a que deux années de mandat sénatorial. Il y a des questionnements sur ses réelles capacités à être, peut-être demain, la candidate du parti démocrate. 

Elle a l’habitude des tribunaux et du Sénat, elle pourrait être douée pour défendre la politique de Biden, ça aurait été utile sur l’Afghanistan notamment… 

Il y a une double stratégie. Il y a aussi la stratégie de Kamala Harris dans cette histoire. Elle est victime d’un procès en intrigue, on la suspecte de lorgner, ce qui est assez normal puisqu’elle est très ambitieuse, sur le poste suivant, qui est celui de président. Donc pour l’instant, elle choisit de ne pas prêter le flanc à ses critiques en donnant l’impression d’être en première ligne. Elle est plutôt sur un registre extrêmement modéré. 

Quand on lit ses tweets, ils sont assez lisses, elle soutient les policiers, les pompiers, les enseignants. Il n’y a aucune aspérité d’aucune sorte. Joe Biden est un pragmatique, ça n’est pas parce qu’il ne l’a pas utilisée pendant les six premiers mois qu’il ne le fera pas le moment venu s’il y trouve un intérêt. Cela pourra être sur un sujet social ou au niveau de la justice, ce qui correspondrait au profil de Kamala Harris. 

On la verra plus bientôt avec les midterms et la fin du mandat ? 

Traditionnellement, le vice-président a une véritable importance au moment des midterms, les élections de mi-mandat. Il supplée le président dans le soutien d’un certain nombre de candidats. Le président se réserve ceux qui sont importants dans les Etats importants où il s’agit de gagner et d’apporter toute sa force, mais le vice-président participe activement à la campagne des midterms aussi. Peut-être qu’on l’enverra soutenir des femmes, des femmes de la diversité… En revanche, si elle n’était pas mise en avant pour les midterms. Là il y aurait vraiment un problème, mais je n’y crois pas du tout. 

Si Biden se lance en 2024, elle reste avec lui selon vous ? 

C’est très rare que le ticket ne soit pas reformé dans le cas d’une réélection. Il faut vraiment que le vice-président ait fait une faute grave ou que son image ait été passablement détériorée. Ce n’est pas du tout le cas pour Kamala Harris, qui conserve tous ses atouts qui n’ont pas encore été utilisés à plein. Elle est en réserve, elle évite les pièges, elle ne se livre pas, donc si Joe Biden décide d’y retourner, il y a très peu de chances qu’il choisisse une autre candidature, d’autant qu’il devrait expliquer pourquoi. 

«Kamala Harris, la pionnière de l'Amérique», d'Olivier Piton (Ed. Plon) 20 euros.

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